L’année 2022 touche à sa fin et dans le domaine immobilier, elle restera marquée par la forte remontée des taux d’intérêts et le problème lié à l’usure, deux phénomènes conjugués qui ont grippé l’accès au crédit et renvoyé aux calendes grecques bon nombre de projets immobiliers. Quelles seront les conditions en 2023, entre les évolutions réglementaires et les craintes d’un contexte monétaire davantage dégradé ?
Difficile accès au prêt immobilier en 2022
Depuis des mois, depuis le printemps 2022 pour être précis, les conditions d’emprunt se sont détériorées, dans le sillage de la forte poussée inflationniste et de la politique monétaire moins accommodante de la Banque Centrale Européenne. Le taux moyen est passé graduellement de 1,05% en janvier (hors assurance emprunteur et coût des sûretés) à 2,25% en novembre 2022 (données Observatoire Crédit Logement/CSA). Les taux sont au plus haut depuis 7 ans et on s’oriente vers des taux à plus de 3% dès le premier trimestre 2023.
Réformer l’usure en 2023
Ce renchérissement du loyer de l’argent entraîne une baisse de pouvoir d’achat des ménages emprunteurs de l’ordre de 15%, d’autant plus pénalisant que les prix de l’immobilier ne faiblissent pas, même si on observe un début de baisse des prix dans les grandes villes. La situation ne serait pas dramatique si elle n’était pas plombée par la réglementation obsolète de l’usure, totalement décorrélée de la réalité du terrain. La méthode de calcul trimestrielle opère un décalage trop important avec les taux du marché, en constante progression depuis janvier 2022.
2022, l’année des refus de prêts immobiliers
Les candidats à l’emprunt sont victimes de l’effet ciseau qui n’a jamais autant fait parler de lui : une vente sur deux échoue à cause d’un refus de prêt, la raison principale étant le TAEG au-delà du taux d’usure. Pour alerter les pouvoirs publics sur ce phénomène inquiétant, a été créé en septembre dernier un site Cafpi dédié au refus de prêt qui relaye les témoignages des ménages recalés par la problématique de l’usure.
Accès au crédit immobilier en 2023
La hausse des taux débiteurs, le dysfonctionnement de l’usure et les normes d’octroi imposées forment le triangle des Bermudes dans lequel disparaissent les projets immobiliers des ménages français. Faut-il attendre 2023 pour s’engager ? Les conditions de crédit sont promises à une nouvelle dégradation. La BCE va de nouveau rehausser son taux de refinancement en décembre et la Banque de France n’a pour l’heure aucune intention de réformer l’usure ni d’assouplir les règles d’octroi (taux d’endettement maximum à 35% et durée de remboursement plafonnée à 25 ans).
Une relative détente aura lieu le 1er janvier 2023 avec les nouveaux taux d’usure, mais elle risque d’être de courte durée si les taux d’intérêts continuent de gonfler.
La révolution de la loi Lemoine
L’année 2022 est ternie par le blocage du crédit immobilier, elle aura cependant permis l’avènement de la loi Lemoine, un dispositif révolutionnaire qui autorise tout emprunteur à changer d’assurance de prêt immobilier à tout moment depuis septembre 2022, sans attendre une date butoir ni respecter un délai de préavis.
Exit les lois Hamon et Bourquin, qui ont montré leurs défaillances et échoué à déverrouiller le marché de l’assurance emprunteur malgré le principe de libre choix du contrat gravé dans le marbre depuis 2010. Les banques détiennent toujours 87% des cotisations annuelles, mais le boom du changement d’assurance de prêt immobilier indique que les assureurs alternatifs commencent à grignoter des parts de marché au bénéfice des ménages emprunteurs.
La loi Lemoine se veut également un dispositif inclusif en supprimant le questionnaire de santé pour les prêts de moins de 200 000€ remboursés avant le 60ème anniversaire de l’emprunteur et en renforçant le droit à l’oubli dont l’accès est possible désormais au bout de 5 ans.
Les changements réglementaires en 2023
Aides publiques
L’avenir du PTZ et du Pinel en 2023 était pour le moins incertain, mais les deux dispositifs sont finalement maintenus, sans toutefois conserver les avantages des versions précédentes.
Le PTZ ou Prêt à Taux Zéro, destiné aux primo-accédants de la résidence principale, est prolongé jusqu’au 31 décembre 2023, mais les conditions d’accès vont évoluer : le montant des ressources examiné sera celui à la date d’émission de l’offre de prêt et non plus celui de l’année N-2. Il est par ailleurs possible que l’octroi du PTZ soit conditionné à un niveau de performance énergétique. Les décrets d’application sont attendus.
Les taux de réduction d’impôt du Pinel, réservé quant à lui aux investisseurs, sont rabotés en 2023, puis de nouveau en 2024. Seuls certains logements neufs répondant à des critères environnementaux précis seront éligibles au Pinel Plus qui offrira la même carotte fiscale qu’en 2022.
Lutte contre les passoires thermiques
Les propriétaires de biens énergivores sont dans le collimateur du gouvernement. En 2023, les passoires thermiques, c’est-à-dire les biens classés F ou G sur l’échelle du DPE, seront contraintes par les nouvelles règles issues de la loi Climat :
- Interdiction de louer un logement de classe G affichant un niveau de consommation de plus de 450 kWh/an à compter du 1er janvier 2022
- Obligation de réaliser un audit énergétique pour toute vente de logement de classe F ou G à partir du 1er avril 2023.
L’objectif est d’inciter les propriétaires bailleurs à rénover leurs biens désormais considérés comme indécents selon les nouvelles normes, en utilisant notamment MaPrimRénov’, l’aide centrale à la rénovation énergétique. L’année 2022 a par ailleurs révélé que le diagnostic immobilier compte pour obtenir son prêt, l’emprunteur devant être en capacité de financer les travaux destinés à requalifier le bien.
Taxes immobilières
Attention à la taxe foncière en 2023 ! Elle va peser sur le pouvoir d’achat de tous les ménages propriétaires de leur logement. Les futurs emprunteurs doivent eux aussi en tenir compte dans leur projet. S’il est possible de faire des économies sur ses assurances et ses crédits, il est malheureusement impossible d’échapper à cette taxe, contrairement à la taxe d’habitation qui disparaît pour tous à compter du 1er janvier 2023.