Le pouvoir d’achat immobilier des ménages français se dégrade au fil des mois à cause de la progression constante des taux d’emprunt alors que le niveau des prix des logements faiblit à peine. L’entrée en vigueur de la loi Climat pourrait faciliter l’accession à la propriété par l’arrivée grandissante de passoires thermiques sur le marché.
Loi Climat et immobilier
Adopté en août 2021, la loi Climat et Résilience vise la neutralité carbone à l’horizon 2050 et en matière d’impact environnemental, l’immobilier affole les compteurs avec 45% de l’énergie consommée (31,3% pour les transports) et environ un quart des émissions de gaz à effet de serre. Dans le collimateur de cette loi, qui tombe à point nommé dans un contexte de crise énergétique, les passoires thermiques, qu’elle cherche à éradiquer d’ici dix ans.
Les contraintes pour les propriétaires bailleurs de logements énergivores se mettent en place progressivement depuis l’été dernier :
- depuis le 25 août 2022 : interdiction d’augmenter le loyer des logements classés F et G sur l’échelle du DPE (Diagnostic de Performance Énergétique), sauf travaux de rénovation d’envergure
- depuis le 1er janvier 2023 : les pires logements de la classe G sont qualifiés d’indécents et donc interdits de location (énergie finale supérieure à 450 kWh/m2).
- à partir de janvier 2025 : interdiction de location de tous les logements classés G
- à partir de janvier 2028 : interdiction de location des logements classés F et G
- à partir de janvier 2034 : interdiction de location des logements classés E, F et G.
Toute vente d’un bien immobilier classé F ou G doit être accompagnée d’un audit énergétique depuis le 1er septembre 2022. Le document annexé au DPE devenu opposable doit comprendre des propositions de travaux, une estimation du coût des travaux et une estimation du gain d’économie d’énergie.
Vendre plutôt que rénover une passoire thermique
Tout porte à croire que les Français se débarrassent de leurs passoires thermiques. Dans leur bilan du marché immobilier 2022, les notaires de France observent une nette augmentation des volumes de vente des biens de catégories F et G. Les logements énergivores représentaient 17% des transactions du troisième trimestre, contre 11% un an auparavant. Selon une enquête du réseau Foncia, 73% des propriétaires de passoires thermiques hésiteraient entre vendre leur bien ou le rénover à grands frais.
Malgré les aides à la rénovation pour faire des économies d’énergie, engager des travaux importants qui permettent de sauter deux classes énergétiques nécessite un financement au bas mot de 50 000€. MaPrimRénov’ concerne encore trop peu les rénovations globales et quand le logement se situe dans une copropriété, les travaux envisageables sont soumis au vote de l’assemblée générale des copropriétaires.
De nombreux bailleurs préfèrent vendre leur(s) bien(s) mal classé(s), par faute de moyens financiers pour le(s) rénover, ou lassés de la procédure en copropriété, quitte à subir une décote non négligeable. Alors que les taux de crédit immobilier continuent de grimper en février 2023, acheter une passoire thermique est peut-être une opportunité d’accéder plus facilement à la propriété.
Passoire thermique : une décote jusqu’à 20%
La hausse des taux d’intérêts combinée à l’inflation réduit le pouvoir d’achat immobilier des futurs acquéreurs. Le réseau d’agences immobilières L’Adresse estime que les acheteurs ont perdu près de 20% de capacité d’emprunt depuis 2019, une baisse qui pourrait être compensée par la décote significative pour les biens classés F ou G, dits passoires thermiques.
La marge de négociation se situe en moyenne entre 5% et 10%, et peut aller jusqu’à 20% pour les biens les moins bien notés. Les acheteurs font valoir les travaux qu’ils devront entreprendre pour mettre le logement aux normes, d’autant que désormais le diagnostic immobilier compte pour obtenir son prêt.
Les primo-accédants peuvent bénéficier du PTZ dans l’ancien sous réserve que le bien se situe en zone B2 ou C et que les travaux représentent au moins 25% du montant de l’opération. Le PTZ peut ainsi financer jusqu’à 40% du coût de l’acquisition, travaux inclus, avec un différé de remboursement entre 5 et 15 ans, ce qui permet de mieux maîtriser le taux d’endettement.
Si le logement acquis est destiné à être loué, les travaux sont nécessaires et peuvent être en partie financés via le dispositif Denormandie. L’enveloppe des travaux doit là aussi représenter au moins 25% du coût total de l’opération et le logement se situer dans les communes suivantes :
- communes dont le besoin de réhabilitation de l’habitat est important
- communes en zone labellisée Cœur de Ville
- communes ayant passé une convention d’opération de revitalisation de territoire.
Les travaux doivent permettre un gain énergétique d’au moins 20% (30% pour les logements individuels) et créer une surface habitable nouvelle (terrasse, balcon, garage par exemple).
Les futurs bailleurs peuvent aussi profiter du doublement du déficit foncier en 2023, qui passe ainsi de 10 700€ à 21 400€ à condition que les dépenses de rénovation engagées entre le 1er janvier 2023 et le 31 décembre 2025 permettent au logement d’afficher une classe énergétique plus vertueuse (A,B, C ou D).