Entré en application le 1er juillet dernier, le nouveau Diagnostic de Performance Énergétique montre déjà ses limites. La méthode de calcul dégrade un nombre de biens plus élevé que prévu, avec des erreurs notables dans les coûts de consommations, en particulier pour les logements construits avant 1975. En attendant des mesures correctives, l'édition du DPE est suspendue pour ce type de biens immobiliers.
Éradiquer les passoires thermiques
Selon une récente étude du site d'annonces immobilières PAP, un quart des Français n'a aucune notion de ce qu'est le DPE. Obligatoire sur toutes les annonces de vente et de location, il renseigne sur la performance énergétique du logement comme cela se pratique pour les appareils d'électroménager. Adossé à une méthode de calcul qui permet d'évaluer la consommation et les émissions de carbone des logements afin de le rendre plus fiable, le nouveau DPE est en place depuis le 1er juillet 2021. Autre évolution majeure par rapport à l’ancienne version, il est devenu juridiquement opposable, c'est-à-dire qu'il engage la responsabilité du propriétaire.
Un acheteur ou un locataire qui constatera des écarts importants entre les résultats du DPE et sa consommation énergétique réelle pourra en refaire un à ses frais et réclamer réparation au vendeur ou au bailleur en cas d’erreur avérée. À charge pour ces derniers de se retourner contre le diagnostiqueur.
L’importance du DPE est donc cruciale, car ce dispositif sanctuarise tout le volet rénovation énergétique des logements inscrit dans le plan de relance. Le DPE concerne vendeurs, bailleurs et aussi acheteurs qui peuvent négocier ferme le prix d'un bien immobilier dont la note énergétique est peu vertueuse. Annexé au dossier technique de l'avant-contrat de vente ou au contrat de bail, le DPE doit être effectué par un diagnostiqueur certifié, et permet entre autres d'identifier les logements énergivores (F et G), les fameuses passoires thermiques que la réforme cloue au pilori en interdisant progressivement leur location à compter de janvier 2025.
S'il ne rend pas les travaux obligatoires, le DPE devra, à compter de janvier 2022, intégrer des recommandations de rénovation pour faire grimper la note (classe A ou B) d'un logement mis en vente. Autant d'éléments qui pèsent dans la négociation et qui placent l'acheteur en position de force. La chasse aux passoires thermiques est donc lancée et certains propriétaires en font la douloureuse expérience. Les logements déclassés perdent leur cote, réduisant au passage les prétentions des vendeurs. À l’horizon 2025, les logements très énergivores (F et G) devront avoir disparu du marché, soit 4,8 millions de logements selon les chiffres avancés par le gouvernement.
Le besoin d’améliorer le confort des logements est criant, pour le bien-être des habitants et le bénéfice environnemental, le DPE étant un des piliers de la rénovation thermique.
Explosion du nombre de passoires thermiques
Censé être plus fiable, le nouveau DPE suscite de vives interrogations de la part des professionnels de l'immobilier. Les remontées du terrain indiquent que la nouvelle méthode de calcul augmente considérablement les logements classés énergivores (F et G), ceux assimilés à des passoires thermiques. Leur nombre est en train de doubler selon la Fnaim, première à dégainer et à alerter le gouvernement sur les défaillances du dispositif.
Dénonçant une version du nouveau DPE "insuffisamment testée", la Fédération interprofessionnelle du diagnostic immobilier (Fidi) et l'Union des syndicats de l'immobilier (Unis) ont constaté des ratés concernant le logiciel de calcul qui conduisent à des écarts considérables par rapport aux résultats de l'ancien DPE, mais aussi au regard de la consommation réelle. Le problème concerne en premier lieu les logements construits avant 1975 pour lesquels les diagnostiqueurs n'avaient pas de données techniques quant aux déperditions thermiques, ce qui les obligeait à réaliser les DPE sur facture.
À noter que les DPE effectués selon l’ancienne méthode restent valables jusqu’à fin 2024, sauf si leur durée de validité de 10 ans est dépassée entre-temps.
Suspension pour les logements construits avant 1975
Le gouvernement a pris la mesure du problème et décidé, vendredi 24 septembre, de suspendre l'édition des DPE pour les logements datant d'avant 1975, hormis dans les cas rendus nécessaires par des transactions urgentes. La responsabilité des professionnels ne sera pas engagée sur les diagnostics qui seront à refaire. Le ministère de la Transition Écologique indique que des analyses sont en cours pour identifier les anomalies et y apporter les corrections utiles.
Une réunion entre les services de l'État et les professionnels est prévue le 4 octobre prochain ; elle permettra de détailler les problèmes constatés et de préciser les modifications apportées au nouveau DPE. Celles-ci devront garantir la fiabilité des DPE réalisés depuis le 1er juillet, sans frais supplémentaires pour les propriétaires concernés, assure le gouvernement. Nombreux seront les propriétaires s’estimant lésés, vendeurs comme bailleurs, à réclamer une nouvelle évaluation. On imagine mal les diagnostiqueurs devoir supporter seuls le coût d’un nouveau DPE.