Le marché immobilier est en pleine crise. Les ventes dans l’ancien reculent nettement et le neuf est à la peine à cause d’une pénurie d’offres. Les experts y vont de leurs pronostics pour l’année en cours, et poussent cet exercice délicat jusqu'en 2024. Niveau des prix et des taux d’intérêts, Magnolia.fr vous livre les dernières analyses des professionnels du financement immobilier.
Faible recul des prix en 2023 et 2024
Les experts immobiliers du groupe bancaire BPCE prévoient un très net repli des transactions en 2023, les prix de l’immobilier ancien restant à des niveaux élevés avec une correction à la baisse faiblement marquée. Les vendeurs campent sur leurs positions et se refusent pour le moment à baisser leurs prétentions.
Le volume des transactions accuserait une chute de 17% en 2023, à 922 000 unités, soit une diminution d’environ 23% par rapport aux chiffres record de l’année 2021 (près de 1,2 millions de ventes dans l’ancien). Le repli serait de -5% en 2024.
Côté prix, pas de contraction dans des proportions attendues pour faciliter l’accès à la propriété. Les prix immobiliers doivent baisser en 2023 pour compenser la hausse des taux comme le souhaiteraient certains professionnels du crédit, mais les prévisions de BPCE tablent sur un recul de 2,5% cette année, plus marqué en 2024 avec -3,5%.
Comment vont évoluer les taux d’intérêt en 2023 ?
La baisse du volume des transactions est imputable en grande partie au ralentissement de la distribution des crédits immobiliers. Plusieurs facteurs expliquent le phénomène :
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La hausse des taux d’intérêts depuis plus d’un an : de 1% (hors assurance prêt immobilier et coût des sûretés), le taux moyen sur 20 ans atteint désormais près de 3,50%.
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L’inadaptabilité de l’usure au contexte monétaire : bien que mensualisé jusqu’à juillet 2023, le taux d’usure n’évolue pas au rythme des conditions monétaires imposées par les marchés financiers et la Banque Centrale Européenne.
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La faible profitabilité des banques sur les nouveaux crédits : en lien avec le dysfonctionnement de l’usure, les banques ne peuvent pratiquer des taux de crédit en conséquence des coûts de refinancement auxquelles elles sont confrontées.
Le groupe BPCE estime que les taux d’intérêts des crédits immobiliers vont continuer d’augmenter en 2023 pour se situer en moyenne à 3,7% en 2024. D’ici l’an prochain, le contexte monétaire aura sans doute subi maints changements en lien avec l’évolution de la situation géopolitique et les décisions de la BCE qui vise toujours l’objectif de ramener l’inflation autour de 2%.
Est-ce le moment d’acheter un bien immobilier ?
Selon le réseau Century 21, il faudrait que les prix de l’immobilier reculent de 10% à 12% en 2023 pour compenser mathématiquement la hausse des taux d’emprunt. On est loin du compte si l’on se fie aux pronostics de BPCE, même si l’on constate les prix en baisse dans les grandes villes au premier trimestre 2023. Et pour la première fois depuis longtemps, le site spécialisé dans l’estimation immobilière MeilleursAgents a mesuré une légère baisse des prix dans les villes moyennes et les zones rurales au cours du premier trimestre 2023.
Baisse du pouvoir d’achat immobilier
D’après les calculs du groupe bancaire, la baisse de la capacité d’emprunt serait limitée à 11% entre 2021 et 2024 dans l’hypothèse où le revenu brut disponible augmenterait selon les prévisions de l’Insee. Le revenu brut disponible, qui est le revenu à la disposition du ménage pour consommer et épargner (revenus nets d’activité, indemnités chômage, retraites, pensions, revenus du patrimoine et prestations sociales, nets des impôts directs), a augmenté de près de 3% au dernier trimestre 2022.
L’accès au logement reste une préoccupation majeure des Français. Faut-il acheter ou vendre en 2023 ? La question n’est pas tranchée. Dans un récent sondage OpinionWay pour le réseau Laforêt Immobilier, 14% des ménages déclarent avoir l’intention d’acheter un bien immobilier au cours de l’année 2023, et parmi eux, 26% sont âgés entre 26 et 34 ans. Problème : la hausse des taux est un frein majeur, en particulier dans les zones où les prix des logements sont historiquement élevés comme à Paris et en Île-de-France.
Retournement du marché immobilier
Alors qu’accéder à la propriété est toujours le rêve des Français pour 2023 et 2024, le passage à l’acte reste entravé par les conditions d’emprunt et les normes d’octroi rigides qui limitent le taux d’endettement à 35% des revenus nets, assurance emprunteur comprise, et la durée de remboursement à 25 ans. Résultat, l’accès au crédit immobilier est bloqué pour les ménages aisés en 2023 en vertu d’un encadrement de la distribution des financements bancaires qui ne tiennent pas compte du reste à vivre.
Le marché immobilier serait-il en phase de retournement en 2023 ? Entre le durcissement des normes d’octroi du régulateur financier, les aspirations post-Covid des ménages, l’inflation, la remontée brutale des taux de crédit, la guerre en Ukraine, la chute des programmes neufs, la chasse aux passoires thermiques, l’encadrement des loyers, la frilosité des banques, les raisons ne manquent pas pour caractériser la crise immobilière déjà installée. Il faut d’urgence mettre en œuvre un assouplissement des règles d’octroi du HCSF en 2023 pour échapper au marasme qui guette. C’est d’ailleurs le souhait du ministre de l’Économie Bruno Le Maire. Qu’attendent les autorités pour agir ?