Pour débloquer l’accès au crédit immobilier, la Banque de France a décidé la révision mensuelle des taux d’usure depuis le 1er février dernier plutôt que l’habituel ajustement trimestriel. La mesure ne fait pas miracle, la production de crédits à l’habitat est en chute libre dans un contexte marqué par une progression constante des taux d’intérêts, qui n’est malheureusement pas compensée par une baisse significative des prix immobiliers.
Taux d’usure mensualisé jusqu’au 1er janvier 2024
En janvier 2023, sous la pression des associations de courtiers et de la Fédération bancaire française, la Banque de France décide de procéder à la mensualisation des taux d’usure à partir du 1er février 2023 pour une durée provisoire de six mois. L’objectif est de fluidifier l’accès au crédit immobilier, bloqué depuis la dérive de l’inflation au printemps 2022 qui oblige la Banque Centrale Européenne à mettre un terme à sa politique de l’argent facile en rehaussant ses taux directeurs, dont le fameux taux de refinancement.
Avant cette décision, le taux d’usure était ajusté chaque trimestre à partir des moyennes des TAEG pratiqués par les banques, auxquelles est ajoutée une marge d’un tiers. Figés pour trois mois, les taux maximums légaux étaient incapables de progresser au rythme de la remontée opiniâtre des taux d’intérêts. La méthode de calcul reste la même, mais leur mensualisation doit permettre de retarder l’effet ciseau, l’obstacle auquel sont confrontés bon nombre de candidats à l’emprunt immobilier depuis mi-2022. La solvabilité du dossier n'était plus un gage suffisant pour accéder au crédit compte tenu de l’envolée des taux entre deux périodes de fixation de l’usure.
Rappelons que les TAEG (Taux Annuels Effectifs Globaux) qui servent à déterminer le niveau de l’usure contiennent tous les frais liés au crédit immobilier, les intérêts, mais aussi toutes les dépenses annexes exigées par la banque pour octroyer le financement (assurance de prêt immobilier, frais de garantie, frais de dossier, etc.).
La semaine dernière, les autorités financières ont confirmé que la révision mensuelle du taux d’usure sera prolongée jusqu’au 1er janvier 2024.
Taux d’usure en forte hausse pour juillet 2023
La mensualisation du taux d’usure permet aux banques de rétablir quelque peu leurs marges, mais la BCE n'en a pas fini de rehausser ses taux directeurs. Le taux de refinancement est passé de 0% à 4% par sept étapes successives depuis juillet 2022, et il est probable qu’un nouveau relèvement soit acté au cours de l’été.
Le taux d’usure est supérieur à 5% pour juillet 2023, titrant 5,09% pour les prêts d’une durée de 20 ans et plus, soit une augmentation importante de 41 points de base par rapport au mois précédent. C’est le signe d’une forte progression des taux d’intérêts durant les dernières semaines, ce qui n’est guère encourageant pour les ménages souhaitant devenir propriétaires de leur logement, alors que les prix immobiliers continuent d'augmenter dans de nombreuses régions.
Un assouplissement des règles d’octroi était vivement attendu par tous les acteurs du crédit, mais le Haut Conseil de Stabilité Financière choisit de maintenir le taux d’endettement à 35% des revenus nets (assurance emprunteur comprise) et la durée de remboursement à 25 ans (voire 27 ans pour un achat dans le neuf). Le crédit immobilier ne sera pas plus accessible fin 2023.
Impact très réduit sur la production de crédits immobiliers
La mensualisation du taux d’usure n’a pas l’effet escompté sur la production de crédits immobiliers. Depuis l’été dernier, elle est en chute libre, estimée à fin mai 2023 à 14,5 milliards d’euros, soit un repli spectaculaire de -45,9% par rapport à mai 2022 (chiffres Banque de France). Le déblocage de l’accès au crédit n’a pas eu lieu. Quels auraient été les chiffres si le taux d’usure avait continué à être révisé chaque trimestre ?
Tant que les conditions monétaires ne seront pas stabilisées, les banques resteront réticentes à prêter. Il n’y a aujourd’hui aucune réponse au manque d’offre bancaire et la raréfaction du crédit plonge le pays dans une grave crise de l’immobilier en 2023.