Mardi 20 septembre, une centaine de courtiers en crédit immobilier a manifesté devant la Banque de France pour réclamer un relèvement significatif des taux d'usure. L'accès au crédit et par extension à la propriété risque malheureusement de rester bloqué, l'institution n'ayant nullement l'intention de changer un iota à la méthode de calcul en place depuis 2016.
Les courtiers en colère
Après des semaines, voire des mois, d'interpellation dans les médias, et d'une pétition en ligne, les courtiers ont employé les grands moyens ce mardi 20 septembre en manifestant devant la Banque de France (BdF). Le motif de cette mobilisation sans précédent ? Le taux d'usure 2022, ce taux maximum légal que les banques commerciales ne doivent pas dépasser lors de l'octroi d'un crédit immobilier.
Instauré pour éviter toute éventuelle pratique abusive du prêteur, le taux d'usure est depuis des mois facteur de blocage et responsable, d'après les intermédiaires, d'un très grand nombre de refus de financement. Les courtiers avancent le taux de refus de 45% depuis août et chez certains professionnels, les dossiers recalés représenteraient 70% de leurs demandes. Des chiffres contestés par le BdF qui affirme que le marché immobilier reste dynamique malgré la remontée des taux d'emprunt depuis mars dernier, amplifiée par la nouvelle hausse en septembre 2022.
La délégation, menée par l'Union des intermédiaires de crédit (UIC), a demandé à la BdF une "rehausse exceptionnelle de l'usure au 1er octobre", vœu qui ne sera pas exaucé. François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la BdF, a rappelé que le rôle de la BdF était de calculer l'usure sur la base des dispositions légales pour protéger les emprunteurs, et qu'il n'y avait aucun mépris ni déni de la profession, comme ont pu le dénoncer dernièrement certains acteurs.
Taux d'usure au T4 2022 : une révision insuffisante
Dans un communiqué publié à l'issue de cette manifestation, la BdF rappelle que "le taux d'usure sera normalement relevé le 1er octobre, de façon bien proportionnée et plus marquée qu'en juin dernier, en accord avec le Ministre de l'économie et des finances". L'institution affirme que ce relèvement permettra "de régler certaines situations les plus difficiles d'accès au crédit relevées ces dernières semaines".
La méthode de calcul est en cause, car elle génère un décalage trop important entre le moment où l'usure est fixée par la BdF et les taux d'intérêt du marché. Face à la remontée très nette de ces derniers, la stagnation de l'usure pour un long trimestre entraîne un effet ciseau pour bon nombre de candidats à l'emprunt. Comment justifier à des ménages solvables qui rêvent d'accéder à la propriété que le crédit immobilier reste bon marché, mais inaccessible ?
Sont principalement concernés les plus de 55 ans, profils pénalisés par le coût de l'assurance prêt immobilier, mais aussi les jeunes primo-accédants, empêchés par les règles d'octroi qui renforcent l'exigence d'apport personnel par deux limites imposées :
- le taux d'endettement est plafonné à 35% des revenus nets ;
- la durée de remboursement est limitée à 25 ans (jusqu'à 27 ans en cas d'acquisition dans le neuf ou dans l'ancien avec travaux d'envergure).
La hausse prévue du taux d'usure au 1er octobre risque de faire perdurer le problème et de bloquer une partie des transactions. Pour mémoire, le taux d'usure est le TAEG à ne pas outrepasser sur la durée concernée. Pour les prêts remboursés sur 20 ans et plus, le taux d'usure est actuellement de 2,57%. Avec un taux nominal à 2% sur 20 ans, l'équation est bien compliquée pour intégrer tous les frais liés à l'obtention du crédit, à commencer par l'assurance de prêt, deuxième coût après les intérêts d'emprunt.
Quelle que soit la marge permise par les nouveaux taux légaux au dernier trimestre 2022, la délégation d'assurance emprunteur reste le seul levier efficace pour rester sous l'usure et obtenir le financement de son projet immobilier.