L’accès au crédit immobilier dépend de critères de solvabilité appréciés par la banque. Le taux d’endettement ne doit pas dépasser un certain seuil et le reste à vivre doit être décent pour que le financement soit accordé. Un récent arrêt de la Cour de cassation pourrait faire jurisprudence en admettant que le taux d’effort peut excéder la norme autorisée si le reste à vivre pour les dépenses du quotidien est jugé suffisant. Explications.
Taux d’endettement supérieur à 35%
Depuis une décision du Haut Conseil de Stabilité Financière de septembre 2021, le taux d’endettement maximum autorisé ne doit pas excéder 35% des revenus nets de l’emprunteur, avant impôt et assurance de prêt immobilier comprise. Les règles du HCSF limitent par ailleurs la durée de remboursement à 25 ans, sauf exception dans le neuf (achat en VEFA) ou dans l’ancien avec travaux de rénovation importants où elle peut aller jusqu’à 27 ans.
Auparavant, les banques fixaient par usage un taux d’endettement autour de 33%. En fonction des paramètres financiers de l’emprunteur, elles pouvaient appliquer un taux d’effort plus faible ou plus élevé. Mais depuis janvier 2022, elles sont soumises à cette norme stricte qui leur est juridiquement imposée.
Un arrêt de la Cour de cassation rendu en juillet dernier écorne cette certitude. Un couple d’emprunteurs avait assigné la banque en responsabilité invoquant plusieurs manquements à ses obligations, notamment à son devoir de mise en garde en matière de taux d’endettement excessif qui s’élevait en l’occurrence à près de 65%.
La Cour a jugé que le crédit consenti n’était pas excessif puisque le reste à vivre du couple était suffisant : «[...] le créancier professionnel est tenu d'un devoir de mise en garde à l'égard de tout emprunteur ou caution personne physique lorsque le crédit consenti est inadapté à ses capacités financières », ce qui n’était pas le cas du couple en question.
Reste à vivre : 3 000€ par mois pour un couple
La Cour de cassation a donc estimé qu’il n’existait aucun risque lié à un endettement excessif dès lors que la charge de crédit laisse au foyer un reste à vivre décent, c’est-à-dire supérieur à 3 000€ pour un couple. Selon les périodes d’amortissement, le couple d’emprunteurs disposait exactement de 3 785€ et d’environ 3 500€ par mois. Avec plus de 3 000€ pour payer les dépenses du quotidien, les juges ont estimé que l’équilibre financier du couple n’était pas en péril.
Cet arrêt vient bousculer le dogme du plafond de l’endettement. Dans sa décision, le HCSF n’a jamais tenu compte du reste à vivre, une notion pourtant fondamentale en matière de distribution de crédit. Un foyer avec des revenus confortables peut en effet s’endetter au-delà de la norme tout en conservant un reste à vivre plus que décent. Malgré les appels des professionnels du crédit à faire bouger les lignes et un récent effet d’annonce du ministre de l’Économie, le régulateur campe sur ses positions : le taux d’endettement maximum ne sera pas bientôt assoupli.
Renégocier son crédit immobilier
Le couple en question a été débouté par la Cour de cassation, mais s’est brillamment révélé opportuniste en réorganisant sa dette pour réduire son taux d’endettement. Chacun peut optimiser le coût de son crédit immobilier en regroupant plusieurs prêts en cours, également en maîtrisant son assurance emprunteur.
La loi Lemoine permet en effet de changer d’assurance de prêt immobilier à tout moment et sans frais, sans attendre la date d’échéance autrefois imposée. En résiliant l’assurance initiale pour la remplacer par une formule moins chère à garanties au moins équivalentes, vous avez l’opportunité d’économiser 20 000€ ou plus sur la durée restante de votre crédit immobilier.
Consultez notre baromètre du pouvoir d’achat immobilier d’octobre 2023 pour constater l’ampleur de l’intérêt financier à changer sans tarder d’assurance de prêt.
Source : Cour de cassation, Chambre civile 1, 12.7.2023, K 22-11.321