Les ennuis, ça vole souvent en escadrille : la hausse des taux d’intérêts, qui va malheureusement continuer, l’usure qui ne suit pas, les règles d’octroi trop rigides, les banques réticentes à prêter, l’exigence renforcée d’apport personnel, l’offre qui se tarit dans certaines zones et les prix qui mollissent peu, autant de « bonnes raisons » de procrastiner et de renvoyer aux calendes grecques son projet d’achat immobilier. Pourtant….
Un marché immobilier au ralenti
Les taux d’intérêts n’en finissent pas d’augmenter et ce n’est pas la dernière hausse du taux de la BCE en juin 2023 qui va arranger la situation. Dans le sillage de la guerre en Ukraine entamée fin février 2022, l’inflation comme les taux d’emprunt sont repartis à la hausse. Fin 2021, il était courant de s’endetter au taux de 1% sur la durée classique de 20 ans (hors assurance de prêt immobilier et frais de garantie). Aujourd’hui, alors que l’été s’amorce, le taux brut sur cette maturité excède les 3,50%.
Pour contrer l’inflation galopante, la Banque Centrale Européenne durcit sa politique monétaire. Fini l’argent facile, quasiment gratuit. Pendant des années, les banques de détail se sont refinancées auprès de l’institution communautaire à 0%, raison pour laquelle elles pouvaient financer les projets immobiliers des particuliers à des taux à un niveau historiquement bas. En parallèle, les taux obligataires, c’est-à-dire les taux auxquels les États empruntent auprès des marchés financiers, étaient eux aussi à leur seuil historique, évoluant même en territoire négatif pendant plusieurs mois.
On peut parler d’anormalité pour qualifier cette période qui a duré environ trois années. Avec la politique ultra-accommodante de la BCE qui a infusé un excès de liquidités dans l’économie, il était logique que les taux d’emprunt soient au plancher. Les ménages étaient incités à consommer et s’endetter. Mais l’inflation rebat les cartes.
Depuis un an et demi, les taux remontent tout en restant à des niveaux décents et toujours inférieurs à l’inflation (5,8% sur un an fin mai 2023). On est désormais sur un marché de retour à la raison, ce qui n’empêche pas vendeurs comme acheteurs d’être perturbés par ce changement de paradigme.
Cette ère de taux bas a généré une activité immobilière record, à 1,17 million de transactions dans l’ancien en 2021 et 1,13 million en 2022. Cette année, la barre du million de ventes ne devrait pas être franchie, en grande partie à cause des difficultés d’accès au crédit bancaire.
Des règles d’octroi trop strictes
La remontée des taux s’est malheureusement accompagnée d’un durcissement des conditions d’octroi. Depuis janvier 2021, donc bien avant la progression des taux, les banques sont soumises à une norme au-delà de laquelle elles ne peuvent plus prêter :
- Le taux d’endettement est plafonné à 35% des revenus nets, avant impôt, assurance emprunteur comprise.
- La durée de remboursement est limitée à 25 ans (voire jusqu’à 27 ans pour un achat dans le neuf ou dans l’ancien avec gros travaux de rénovation).
Et pas question de lâcher du lest. Le Haut Conseil de Stabilité Financière vient de réitérer l’injonction, tout en concédant un léger assouplissement des conditions d’octroi pour les investisseurs. L’ajustement est cosmétique et n’aura qu’un très faible impact sur la production de crédits immobiliers ; il ne permettra pas de pallier les difficultés des primo-accédants, qui écopent des taux les moins performants par manque d’apport personnel et d’épargne de précaution.
Quant à la mensualisation du taux d’usure, mesure qui reste en place jusqu’au 1er janvier 2024, ses bénéfices sont en-deçà de ce qu'on espérait ; il faudrait un réel changement dans son mode de calcul pour accorder une marge de manœuvre plus large. Ce dispositif provisoire parvient toutefois à retarder l’effet ciseau en offrant aux banques une plus grande rapidité pour ajuster leurs barèmes aux contraintes de refinancement.
Tant que les conditions monétaires ne seront pas stabilisées, les taux d’emprunt vont continuer leur progression et les banques de prêter au compte-goutte.
Des prix immobiliers en légère baisse
Même si le nombre de transactions comme leurs valeurs sont sur la pente descendante, impossible de parler de retournement du marché immobilier en 2023. Selon les données de la Fnaim Fédération nationale de l’immobilier) présentées mardi 13 juin, la progression des prix ralentit sur un an, à +2,9% en juin 2023, contre +6,3% en juin 2022. Ils régressent de 1% sur les trois derniers mois. Les maisons accusent la plus forte baisse à -1,7%. La Fnaim anticipe un recul de 5% pour l’année 2023, soit -10% en valeur réelle si on intègre l’inflation.
L’envolée des taux d’emprunt compresse le pouvoir d’achat immobilier des ménages, alors que la correction sur les prix tarde à se montrer significative. Il faudrait une baisse des prix immobiliers de 20% en 2023 pour compenser la hausse des taux. C’est loin d’être le cas. Un surcoût de 50 points de base sur le taux nominal diminue la capacité d’emprunt de 4%.
La baisse des prix est enclenchée mais va rester modérée, elle ne compensera jamais la hausse des taux d’intérêts. Mieux vaut emprunter aujourd’hui à un taux de 3,80% sur 20 ans plutôt qu’attendre, en vain, des conditions plus favorables, et devoir s’endetter à 4,5% et même au-delà. Certains professionnels estiment qu’on se dirige vers des taux de crédit immobilier à 5% pour début 2024.
Si vous empruntez maintenant, pensez à déléguer votre assurance emprunteur, seul levier d’économies face à la hausse des taux. Utilisez un comparateur d’assurance de prêt immobilier et constatez que les offres alternatives sont jusqu’à trois fois moins chères que le contrat proposé par votre banque.