Emprunter pour financer un projet immobilier quand on est employé avec un CDD a toujours été très compliqué. La démarche est devenue quasiment impossible avec la crise sanitaire et économique qui perdure, doublée de conditions d'octroi plus rigoureuses. Les travailleurs non salariés s'en sortent un peu mieux, mais l'accès au crédit demeure une gageure sans CDI.
Accès au crédit immobilier quasiment bloqué pour les CDD
La proportion d'emprunteurs en CDD (Contrat à Durée Déterminée) a encore régressé en 2020. Au sein de son réseau, le courtier Vousfinancer a observé qu'ils étaient seulement 1,2% à pouvoir concrétiser leur projet immobilier en 2020, contre 1,3% en 2019 et 1,7% en 2017. La différence est dans l'épaisseur du trait, mais témoigne des difficultés accrues que rencontrent les personnes qui ne disposent pas du fameux sésame : le Contrat de travail à Durée Indéterminée ou CDI.
Ces chiffres illustrent aussi une très forte distorsion entre la réalité du monde du travail et la distribution crédit immobilier. 87% des embauches se font en CDD et si on dénombre tout juste 12% de salariés en CDD, cette représentation mineure des emprunteurs en CDD dans le marché du crédit immobilier s'explique pour deux raisons : 83% des CDD ont une durée inférieure à un mois et un CDD sur cinq évolue en CDI au bout d'un an contre un sur deux en 1982.
Toujours selon les données de la Dares, 30% des CDD ne duraient qu'une journée en 2017 et 40% des salariés avaient un contrat de moins d'un mois au cours d'un trimestre donné. Le phénomène de contrats courts est particulièrement fréquent dans certains secteurs d'activité comme l'hébergement médico-social, l'audiovisuel ou la restauration, ces deux derniers étant lourdement frappés par la crise actuelle due à l'épidémie de Covid-19 comme le sont l'hôtellerie et le tourisme.
Optimiser son dossier quand on est en CDD
Les banques se sont toujours montrées réticentes à accorder des prêts immobiliers aux personnes en CDD. Cette tendance s'accentue avec la crise économique et son corollaire, la dégradation du marché du travail. Il existe pourtant des solutions pour booster la qualité de son dossier, même si chaque établissement de crédit applique sa propre politique.
Avec un partenaire en CDI, la démarche est nettement plus aisée. Le courtier Vousfinancer constate que 3,2% des co-emprunteurs étaient en CDD l'an passé. Le problème : la capacité d'emprunt est calculée uniquement sur les revenus du co-emprunteur en CDI, ce qui a une incidence sur le taux d'intérêt et la durée de remboursement.
Certaines banques sont plus conciliantes et acceptent de prendre en compte les revenus professionnels de l'emprunteur en CDD. Deux conditions doivent toutefois être remplies :
- l'employabilité, c'est-à-dire la capacité de la personne à retrouver un emploi dans son secteur d'activité ;
- l'ancienneté et la stabilité des revenus : une personne qui enchaîne les CDD depuis plusieurs années et qui dispose d'une épargne ne sera pas systématiquement écartée.
La prise en considération des revenus du co-emprunteur en CDD permet au couple de concrétiser son projet d'achat immobilier à la hauteur de sa réelle capacité d'endettement. L'établissement prêteur comptabilisera d'autres sources pérennes comme la pension alimentaire dès lors qu'elle sera versée sur une période longue.
Les autres profils pénalisés
Les emprunteurs en CDD ne sont pas les seuls pour qui l'accès au crédit est truffé d'obstacles. Pour les personnes en intérim, c'est mission impossible : ils étaient seulement 0,5% en 2020 à financer leur projet immobilier (0,8% en 2019). Les auto-entrepreneurs ne font pas mieux que les travailleurs en CDD.
Quant aux retraités, leur proportion est passée de 3,3% à 2% en un an, et pourrait s'expliquer par l'effet ciseaux du reflux constant des taux d'intérêt et des taux de l'usure en baisse. Pour ces candidats seniors, la prise en compte de l’assurance emprunteur dans le calcul du taux d’endettement se heurte au seuil légal, mathématiquement diminué par le recul des taux d’intérêt. Pour mémoire, le taux d’usure appliqué sur la durée d’emprunt concernée indique le TAEG (Taux Annuel Effectif Global) que la banque ne doit pas dépasser ; ce taux agrège tous les frais liés à l’obtention du crédit, pas seulement les intérêts d’emprunt.
Les seuls profils dont la part n'a pas diminué sont les travailleurs non salariés ou TNS. Ils étaient 6% en 2020 contre 5% en 2019, issus principalement des professions libérales, médicales notamment, qui n'ont pas de difficulté à mettre sur la table trois années de bilan.