L'inflation continue de progresser, s'établissant à 5,8% sur un an à fin juin 2022. Une situation qui pousse les ménages à épargner et qui pénalise les emprunteurs pour cause de salaires qui ne suivent pas cette évolution. Face à l'augmentation des dépenses du quotidien, assumer des mensualités de crédit immobilier devient de plus en plus compliqué, ce qui incite les banques à rehausser leur exigence d'apport personnel.
Poussée inflationniste
Selon les premières estimations de l'Insee, la hausse des prix à la consommation s'est de nouveau accélérée au mois de juin 2022 pour atteindre 5,8%, contre 5,2% en mai. Sur un mois, l'inflation a gagné 0,7%. La barre des 5% n'avait plus été franchie depuis septembre 1985.
Poussée par le déclenchement de la guerre en Ukraine, la dérive inflationniste est imputable au bond spectaculaire des prix de l'énergie : +33,1% par rapport à juin 2021. Les prix de l'alimentation sont eux aussi en forte progression, dans des proportions élevées mais plus mesurées, à +5,7% sur un an. Les prix des services augmentent quant à eux de +3,2% et les prix des biens manufacturés de +2,6%. En glissement annuel, l'inflation est près de quatre fois plus forte qu'il y a un an.
Dans une interview au journal Les Échos le 28 juin dernier, le ministre de l'Économie Bruno Le Maire estime que "le pic inflationniste commencera sa décrue mi-2023". Les observateurs prédisent une inflation à 7% pour fin 2022.
Inflation et épargne de précaution
Sale temps pour les ménages français qui subissent de plein fouet l'ampleur incontrôlée de l'inflation et sa vitesse de progression. Le moral est atteint et beaucoup anticipent des lendemains difficiles en épargnant, sans que ce surplus d'épargne égalise celui du second semestre 2021 (2 milliards d'euros contre 7 milliards d'euros selon les chiffres de la Banque de France).
Au risque de limiter leur consommation, les épargnants français choisissent de préserver autant que possible une épargne suffisante, visant à les rassurer. Un réflexe de précaution paradoxal en période de maigres taux de rendement servis par les placements sans risques (livrets, fonds en euros de l'assurance vie), mais la hausse très nette du coût de la vie est toujours une des premières motivations d'épargne.
Inflation et crédit immobilier
Pour les candidats à l'emprunt immobilier, la situation est inversée. Les taux d'intérêt augmentent, mais restent pour l’heure très inférieurs à l'inflation, en moyenne autour de 1,70% sur la durée classique de 20 ans (hors assurance prêt immobilier et coût des sûretés). On s'endette à bon compte, puisque le loyer de l'argent est plus faible que l'indice des prix à la consommation.
Sauf que les emprunteurs subissent, comme tous les consommateurs, le poids alourdi des dépenses contraintes du quotidien (alimentation, énergie, transport, etc.) dans leur budget mensuel. Pour que l'équilibre se fasse, il faudrait que les salaires progressent au même rythme que l'inflation.
On est loin du compte. Selon la Dares (Direction de l'animation de la recherche, des études et statistiques), organisme qui dépend du ministère du Travail, l’indice du salaire mensuel de base (SMB) de l’ensemble des salariés du secteur privé a progressé de 1,1 % au cours du 1er trimestre 2022, et sur un an, il augmente de 2,3 %. Seuls les emprunteurs dont les revenus progressent très significativement sortent indemnes de ce contexte inflationniste.
Face au renchérissement du crédit immobilier en période d'inflation galopante, les banques se montrent plus rigoureuses dans la sélection des candidats à l'emprunt.
Niveau record de l'apport personnel
Jamais l'apport personnel moyen n'a été aussi élevé depuis une dizaine d'années que le réseau Century 21 effectue des statistiques sur ce sujet. Selon ses dernières données, l’apport personnel représentait 21,2% du montant d'une opération immobilière, soit 55 519€, au cours du premier semestre 2022.
Face à la vive remontée des taux d'intérêt et au niveau toujours surévalué des prix immobiliers, les banques renforcent leur exigence en matière d'apport personnel dans un but plus sélectif, pour donner la priorité aux candidats avec des revenus confortables et une réelle capacité d'épargne. Sur la base des ventes effectuées au sein du réseau, sur un an, entre le premier semestre 2021 et le premier semestre 2022, les prix des appartements ont augmenté de 7,4% et ceux des maisons de 10,7%, ce qui rend difficile l’accession à la propriété des foyers à faibles ou moyens revenus.
Pour limiter le recours à l'emprunt dans une période de forte inflation et de renchérissement des coûts du crédit (notamment coût assurance prêt immobilier depuis la loi Lemoine 2022), les banques réclament une mise de fonds plus importante, ce qui exclut de facto les ménages modestes sans ou avec peu d'épargne.