La souscription à l’assurance emprunteur est un passage obligé dans le cadre d’un crédit immobilier et la démarche consiste toujours, sauf exception, à remplir un questionnaire de santé. Ce document renseigne l’assureur sur l’historique de santé du futur emprunteur, lui permettant de formuler une réponse et d’appliquer une tarification en conséquence. Dans quelle limite le professionnel peut-il obtenir des données de santé ? Les questionnaires sont-ils en phase avec la réglementation, qui a tout récemment évolué avec la loi Lemoine ?
À quoi sert l’assurance emprunteur ?
Dans le cadre d’un prêt immobilier, la banque va se prémunir des risques de défaut de paiement en prenant un maximum de précaution. L’emprunteur doit être couvert par une assurance de prêt qui intervient en cas de défaillance de sa part dans les situations suivantes :
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décès
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invalidité permanente, partielle ou totale
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incapacité de travail temporaire
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éventuellement perte d’emploi.
À l’assurance emprunteur, s’ajoutent d’autres frais de garantie représentés par l’hypothèque ou la caution, une garantie incontournable pour la banque qui entre en jeu pour toutes les situations non couvertes par l’assurance.
L’assurance est donc un élément crucial de tout crédit immobilier car elle offre une protection indispensable à l’emprunteur dans l’incapacité d’assumer l’intégralité de sa dette de manière provisoire ou définitive, et à la banque qui est assurée de récupérer les fonds.
Le formulaire de souscription comprend un questionnaire de santé assurance de prêt immobilier qui va renseigner le prestataire sur l’état de santé du candidat. La première partie de ce document se compose d’une bonne dizaine de questions auxquelles vous répondez par oui ou par non. En présence de maladie(s) ou d’arrêt(s) de travail, l’assureur va demander des compléments d’information (motif, dates, traitement, imagerie médicale, analyse sanguine, ECG, test d’effort, bilan, compte-rendu, etc.).
En cas de risques accrus, la réponse de l’assureur prend une de ces 2 voies :
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acceptation avec surprime, avec ou sans exclusion de garantie
Les profils avec des risques de santé doivent faire valoir la convention Aeras (s’Assurer et emprunter avec un risque aggravé de santé), un dispositif opposable aux banques et aux assureurs qui facilite l’accès à l’assurance et au crédit aux personnes qui ne peuvent être couvertes à des conditions standards en raison de leur passif de santé. Le plafond d’emprunt pour bénéficier du dispositif AERAS est de 420 000€ par emprunteur pour un prêt immobilier remboursé avant son 71ème anniversaire.
Est-ce que les assurances ont accès au dossier médical ?
Les assureurs n’ont nullement le droit de consulter votre dossier médical. Ils se basent uniquement sur les informations que vous transmettez via le questionnaire de santé, informations qui sont légalement protégées par le secret médical.
Vous avez la possibilité de vous faire aider par votre médecin traitant pour remplir le questionnaire. La seule personne habilitée à se renseigner sur votre état de santé est le médecin-conseil de l’assureur, en aucun cas le conseiller bancaire, a fortiori l’agent immobilier.
Quels sont les éléments à ne pas déclarer dans son questionnaire de santé assurance emprunteur ?
Vous n’êtes pas obligé de déclarer certaines données de santé dans le questionnaire de souscription à l’assurance emprunteur :
- certaines opérations médicales ou hospitalisations pour : appendicite, dents de sagesse, hernie inguinale, végétations, amygdales, césarienne, hémorroïdes, IVG, chirurgie esthétique
- certains traitements en cours : contraception, vaccination contre grippe saisonnière ou Covid-19
- les maladies relevant du droit à l’oubli : tous les types de cancer guéris depuis au moins 5 ans et sans rechute, ainsi que l’hépatite virale C dans ce même délai, ne sont à pas à déclarer dans le questionnaire de santé. Si vous avez déclaré votre ancienne maladie, l’assureur n’a pas le droit d’en tenir compte pour formuler sa réponse.
Quel risque si je mens dans le questionnaire d’assurance de prêt ?
La réglementation est claire : « le contrat d'assurance est nul en cas de réticence ou de fausse déclaration intentionnelle de la part de l'assuré, quand cette réticence ou cette fausse déclaration change l'objet du risque ou en diminue l'opinion pour l'assureur, alors même que le risque omis ou dénaturé par l'assuré a été sans influence sur le sinistre » (article L.113-8 du code des assurances).
Le mensonge en assurance emprunteur, intentionnellement ou par omission, est donc une très mauvaise option, car l’assureur va effectuer des vérifications en cas de sinistre déclaré et prononcer la nullité du contrat (fausse déclaration intentionnelle) ou refuser de verser la prestation dans le meilleur des cas (oubli involontaire).
Quelle assurance ne demande pas de questionnaire de santé ?
L’accès à l’assurance emprunteur est compliqué pour les profils qui présentent des risques de santé, une discrimination que le législateur tente de corriger. Depuis le 1er juin 2022 et l’entrée en vigueur de la loi Lemoine, le questionnaire de santé est supprimé sous réserve que :
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la part assurée soit inférieure à 200 000€ (400 000€ en cas d’emprunt à deux avec une quotité d’assurance de prêt à 50% sur chaque tête) ;
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le prêt concerné soit remboursé avant les 60 ans de l’emprunteur.
Si ces conditions cumulatives sont respectées, l’assureur n’a pas le droit de rechercher une quelconque information de santé. Les emprunteurs éligibles considérés à risque pour raisons de santé n’ont plus à supporter de surprimes ou d’exclusions de garanties.
La loi Lemoine autorise également à changer d’assurance de prêt immobilier à tout moment et sans frais, sans attendre la date d’échéance autrefois exigée (loi Bourquin).
Conformité du questionnaire de santé en assurance emprunteur
La loi Lemoine révolutionne le marché de l’assurance emprunteur en permettant à chacun de résilier et substituer la formule en cours à tout moment par une offre moins chère à garanties équivalentes. Les assurances externes sont jusqu’à trois fois moins onéreuses que les contrats groupe bancaires. Vous pouvez consulter notre baromètre du pouvoir d’achat immobilier de septembre 2023 pour constater l’énorme intérêt financier de la loi Lemoine et de la délégation d’assurance de prêt immobilier. La nouvelle réglementation modifie aussi l’accès au droit à l’oubli en raccourcissant le délai pour en bénéficier de 10 à 5 ans (voir plus haut).
Les assureurs ont dû adapter leur questionnaire de santé pour être conformes avec la loi Lemoine sur le volet du droit à l’oubli. On voit pourtant encore circuler des questionnaires interrogeant l’emprunteur sur un éventuel cancer dont il aurait pu souffrir au cours des 10 dernières années. La question relative aux arrêts maladies peut encore porter sur une antériorité de 10 ans, ainsi que l’invalidité ou l’incapacité permanente partielle ou totale : sur ces questions, le motif ou le nom ou la localisation de la pathologie doit être indiqué.
L’assureur a donc le moyen de savoir si l’emprunteur a été atteint d’un cancer, antérieurement aux 5 années de rémission qui lui permettent de taire son ancienne maladie. Une lacune dont devrait s’emparer le Comité Consultatif du Secteur Financier (CCSF), organe officiel dont le rôle est notamment d’observer les dysfonctionnements en assurance et en banque et de proposer des solutions appropriées.