En place depuis début avril 2022, le dispositif MonPsy ouvre droit au remboursement par la Sécu et la mutuelle de 8 séances chez le psychologue par an. Pour de nombreux professionnels, il s'agit d'une mesure maltraitante qui ne fait que jeter de la poudre aux yeux. Pourquoi les psys sont-ils vent debout contre un dispositif qui constitue sur le papier une avancée pour l'accès aux soins ?
Qu'est-ce que MonPsy ?
La crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19 a eu de grands retentissements sur la santé mentale des adultes comme des enfants. L'enquête CoviPrev de l'automne 2021 a démontré la dégradation de l'état psychologique des Français avec l'épidémie (évolution par rapport au niveau avant épidémie) :
- 16% montrent des signes d'un état dépressif (+6 points)
- 26% montrent des signes d'un état anxieux (+12 points)
- 70% ont des problèmes d'insomnie (+20 points).
Les séances chez le psy avaient explosé en 2020 et 2021. Le gouvernement avait alors mis en place en avril 2021 un forfait psy pour les enfants et les ados de 3 à 17 ans permettant le remboursement à 100% par la Sécu de 10 séances de psychologue en ville (PsyEnfantAdo). Les étudiants ont pu bénéficier quant à eux jusqu'à 3 séances de 45 minutes chacune sur prescription d'un médecin généraliste. Les mutuelles s'étaient de leur côté mobilisées en proposant à tous leurs clients couverts par un contrat individuel ou une mutuelle entreprise la prise en charge de 4 séances psychologue minimum au tarif de 60€ la séance.
Le gouvernement a souhaité faciliter l'accès à un soutien psychologique à tous les Français qui en ont besoin. Depuis le 5 avril 2022, le dispositif MonPsy permet à toute personne dès l'âge de 3 ans de bénéficier de 8 séances d'accompagnement psychologique avec prise en charge de l'Assurance Maladie, éventuellement complétée par la mutuelle santé.
Seuls sont concernés les troubles psychiques d'intensité légère ou modérée. Les formes sévères de troubles anxieux ou dépressifs, les troubles psychiatriques, les risques suicidaires ou encore les situations de dépendance, autant de cas qui nécessitent des prises en charge spécialisées, sont exclus du dispositif MonPsy.
Quel remboursement pour les séances MonPsy ?
L'accès au dispositif MonPsy est possible après consultation de médecin traitant (respect du parcours de soins coordonné). Le patient est orienté, via un courrier d'adressage, vers un psychologue conventionné par l'Assurance Maladie, afin de pouvoir bénéficier d'un entretien d'évaluation qui pourra déboucher sur un accompagnement de 7 séances de suivi psychologique.
À l'exception de la première séance d'évaluation, les autres séances peuvent être réalisées à distance.
L'entretien d'évaluation est facturé 40€ et les séances de suivi à 30€. Le nombre de séances est adapté aux besoins du patient par le psychologue. L'Assurance Maladie prend en charge 60% de ces montants opposables, le reste à charge, soit 40%, pouvant faire l'objet d'un remboursement partiel ou total de la mutuelle.
Le tiers payant s’applique obligatoirement pour les personnes bénéficiaires de la Complémentaire Santé Solidaire (CSS), les personnes bénéficiaires de l’Aide Médicale d’État (AME), pour les personnes en Affection de Longue Durée (ALD) en lien avec les soins prodigués, les soins en lien avec une maternité (à partir du 6ème de grossesse), et pour des soins en lien avec un accident du travail ou une maladie professionnelle.
Pour rappel, les séances chez le psychologue sont habituellement remboursées à 100% par l'Assurance Maladie uniquement si elles sont prescrites par le médecin traitant et effectuées au sein d'un hôpital ou d'un centre médico-psychologique. L’Assurance Maladie prend alors en charge 100% du tarif conventionné. Hors de ce cadre très spécifique, le remboursement psy est éventuellement possible par la complémentaire santé via le forfait prévention. A ne pas confondre avec le remboursement psychiatre, seul psy exerçant en tant que médecin.
La colère des psychologues
Présenté comme une des mesures phares des assises de la santé mentale et de la psychiatrie, le dispositif MonPsy est loin de faire l'unanimité chez les professionnels. C'est même un euphémisme tant l'opposition est vive. À Paris et en région, des psychologues sont descendus dans la rue le 10 juin dernier pour manifester contre la mise en place de ce dispositif et plus généralement contre la dégradation de la prise en charge des patients. Il y a un an jour pour jour bon nombre d'entre eux s'étaient déjà mobilisés pour protester contre une politique qui viserait, selon eux, à paramédicaliser la profession.
Force est de constater l'échec de MonPsy. Selon un décompte du syndicat national des psychologues, à peine 5% des professionnels ont intégré le dispositif, soit moins de 1 300 praticiens sur les 27 814 exerçant en libéral. Pourquoi les psychologues sont-ils braqués contre une mesure qui facilite l'accès à une meilleure santé mentale ?
Le dispositif MonPsy relèverait d'une imposture et constituerait un désastre pour le soin psychologique :
- l'accès est indirect car il est prescrit par le médecin traitant, le plus souvent un généraliste par définition non formé à la psychopathologie, auquel le patient doit d'abord se confier ;
- les critères d'exclusion seraient incohérents ;
- une majorité de patients n'y ont pas accès en raison de ces critères exclusifs ;
- les séances MonPsy durent 30 minutes contre 45 minutes à 1 heure pour une séance habituelle de psychothérapie ;
- la sous-tarification des séances.