Dispositif phare de la politique de rénovation énergétique des logements, MaPrimRénov' vient d'être cloué au pilori par la Défenseure des droits. Un rapport étrille cette aide publique, l'accusant de graves dysfonctionnements et de priver les plus modestes d'un soutien financier dont ils ont bien besoin pour améliorer leur habitat. Le budget 2023 prévoit de modifier MaPrimRénov' en ciblant davantage les rénovations globales.
Bugs et retards multiples de MaPrimRénov'
MaPrimRénov’ fait partie des toutes nouvelles aides à la rénovation, mais difficile d'invoquer un retard à l'allumage. Piloté par l'Anah (Agence nationale de l'habitat), ce dispositif public est en place depuis janvier 2020 en remplacement du CITE (Crédit d'Impôt pour la Transition Énergétique) et près de trois ans après sa mise en œuvre, les déboires s'accumulent.
Sans doute victime de son succès (plus de 1,25 million de bénéficiaires), cette aide destinée à encourager la rénovation énergétique des logements fait l'objet d'un rapport accablant de la part du Défenseur des droits, en l'occurrence la Défenseure, puisque l'institution est chapeautée par Claire Hédon depuis juillet 2020.
Dans son communiqué de presse du 17 octobre dernier, l'autorité indépendante liste les nombreux griefs portés à l'encontre de MaPrimRénov' :
- effets pervers du 100% numérique : la demande d'aide se fait obligatoirement et uniquement en ligne, via un formulaire à remplir sur la plateforme dédiée ;
- dysfonctionnements techniques récurrents
- difficultés pour modifier les éléments d'un dossier déjà déposé
- délais de traitement trop longs
- retard de versement de l'aide
- manque d'interlocuteurs
- défaut d'information.
L'obligation de passer par internet pour faire sa demande crée une "rupture d'égalité devant le service public", indique l'institution, empêchant de potentiels bénéficiaires d'y avoir accès. Les démarches administratives dématérialisées doivent rester une option pour l'usager et non une obligation. Face à la nécessité de réaliser des travaux, certains ménages ont dû contracter un prêt bancaire, alors qu'ils étaient en attente du versement de MaPrimRénov'.
Les demandeurs les plus fragiles économiquement sont les premières victimes de ces anomalies, alors qu'ils sont les premiers concernés par la précarité énergétique. Beaucoup vivent dans un logement qualifié de passoire thermique. La Défenseure des droits demande à l'Anah de remédier au plus vite aux problèmes constatés et lui adresse les recommandations suivantes :
- résoudre définitivement les problèmes techniques de la plateforme
- diminuer les délais de traitement des dossiers bloqués
- améliorer l'information sur toute la procédure avec la mise en place d'interlocuteurs compétents, depuis la demande jusqu'au suivi du dossier et des réclamations
- régulariser les demandes n'ayant pu aboutir pour cause de dysfonctionnements
- mettre en place un canal ne passant pas par le portail en ligne.
Réforme de MaPrimRénov' en 2023
Baisser sa facture d’énergie grâce à la rénovation énergétique est un parcours semé d’obstacles, un constat bien dommageable alors que l’envolée du coût de l’électricité oblige les ménages à engager de gros efforts. Ce rapport de la Défenseure des droits tombe au moment même où l'Assemblée nationale vient d'adopter deux amendements au projet de loi de finances 2023 visant à revoir le dispositif MaPrimRénov'. Le but est de recentrer davantage le dispositif sur les rénovations globales au détriment des petits travaux.
Selon un rapport de la Cour des Comptes, le dispositif a permis de rénover 2 500 passoires thermiques en 2021, contre un objectif de 80 000 unités. Contre l'avis du gouvernement, qui reconnaît toutefois la faible efficacité de MaPrimRénov' sur la voie ambitieuse qu'elle s'est fixée, les députés ont voté en faveur d'un amendement déposé par les Républicains et soutenu par les autres groupes d'opposition, qui prévoit la création d'un crédit d'impôt. Cette aide viendrait compléter MaPrimRénov', sans modifier le dispositif existant. Il appartient à l'exécutif d'inclure ou non cet amendement dans la version du PLF 2023 qui sera soumise à la procédure du 49-3.
À noter que la supervision d'un accompagnateur Rénov' sera obligatoire à compter de septembre 2023 pour effectuer une demande MaPrimRnov'. Cela permettra de faciliter l'accès au financement et la nature de travaux à réaliser, tout en guidant leur organisation.