De nombreux Français sont confrontés aux conséquences financières de la crise sanitaire. Trop endettés avant l'épidémie, ils ne parviennent plus aujourd'hui à rembourser leurs mensualités d'emprunt. La solution est de fusionner tous les prêts en cours par un rachat de crédits. Malheureusement la faiblesse actuelle des taux de l'usure peut souvent obérer l'opération. Explications.
Réduire ses mensualités de 50%
Le rachat de crédits s'adresse en premier lieu aux emprunteurs qui peinent à équilibrer leur budget mensuel. Comme l'explique le courtier Cafpi, certains ménages consacrent plus de 50% de leurs revenus au remboursement de leurs dettes, une proportion exorbitante quand on sait que leur seuil d'endettement communément admis et désormais imposé se situe à 33%. Au-delà de ce plafond, le risque de malendettement voire de surendettement est bien réel, pourtant, certains souscrivent un nouveau crédit pour tenter d'honorer leurs engagements, ce qui ne fait qu'aggraver une situation déjà délicate. La sanction ultime est la commission de surendettement pour obtenir un étalement des remboursements ou dans les cas irrémédiables, la suppression pure et simple de la dette, avec toutes les conséquences bancaires que cela implique.
La perte d'emploi ou le chômage partiel (84% des revenus) consécutif à la crise sanitaire a creusé encore plus les difficultés d'un bon nombre de foyers déjà fragilisés par une situation budgétaire précaire. Le rachat de crédits peut les aider momentanément à réduire leurs mensualités de moitié voire jusqu’à 60%. L'opération consiste à regrouper tous les prêts (crédits à la consommation, prêt immobilier) en un seul. La nouvelle mensualité sera calculée en fonction de la capacité de remboursement et permettra de retrouver un taux d'endettement au plus égal à 33%. En fonction de la faisabilité du dossier, l'organisme qui rachète les crédits peut intégrer une nouvelle trésorerie pour permettre au foyer de solder des retards de factures ou d'impôts et lui éviter ainsi d'être à découvert une fois l'opération finalisée.
Les taux applicables au rachat de crédits
La forte diminution de la mensualité n'est possible qu'avec un allongement de la durée de remboursement, ce qui va augmenter le coût global. C'est le prix pour retrouver dans l'immédiat un budget équilibré et éviter des fins de mois dans le rouge durablement. Le coût dépend aussi de la nature des prêts restructurés. Si l'opération comprend au moins 60% d'encours de prêt immobilier, elle tombe sous la réglementation de ce type de crédit. À l'inverse, elle sera encadrée par la réglementation du crédit à la consommation.
Les taux applicables ne sont bien entendu pas les mêmes selon que le regroupement est considéré comme un crédit à la consommation ou comme un prêt immobilier. Les taux bruts sont compris entre 2,5% et 4,73% pour un rachat de crédits conso sur une durée maximum de 180 mois (15 ans), auxquels il faut ajouter entre 1% et 2% de frais annexes (assurance, frais de courtage). Au final, le TAEG (Taux Annuel Effectif Global), taux qui agrège tous les coûts liés au rachat, atteint 3,9% à 5,9%. Si l'encours du rachat est supérieur à 6 000€, le TAEG est légalement plafonné par un taux d'usure à 5,68%.
Dans le cas d'un rachat dominé par un encours immobilier, ce sont les taux d'usure des crédits immobiliers qui s'appliquent sur l'ensemble de l'opération, soit 2,40% si la durée de remboursement est comprise entre 10 et moins de 20 ans, et 2,51% si la durée est de 20 ans ou plus. L'emprunteur est donc favorisé par un taux beaucoup plus bas que le niveau des taux des crédits conso. Malheureusement le profil même d'un client pour le rachat de crédits, dont la solvabilité est manifestement érodée, est généralement peu compatible avec des taux d'emprunt performants. Il écope d'un taux supérieur à la moyenne du marché ; une fois intégrés tous les frais obligatoires, le TAEG excède le seuil de l'usure et l'opération de rachat de crédits est alors refusée.
Le rachat de crédits pénalisé par les consignes du HCSF
À ce frein légal dont la finalité n'a pas à être remise en cause, puisqu'elle protège le consommateur, il convient d'en ajouter un autre : la durée de remboursement limitée à 25 ans. En décembre dernier, le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) a demandé aux banques et autres organismes de crédit de respecter les règles cumulables du taux d'endettement limité à 33% et de la durée de remboursement plafonnée à 25 ans. Cette double limitation s'impose aux crédits immobiliers, mais aussi aux rachats de crédits dont l'encours immobilier atteint au moins 60%.
Avant cette recommandation, qui a valeur d'obligation pour les prêteurs, une restructuration de crédits avec garantie hypothécaire pouvait aller jusqu'à 35 ans, sous réserve que l'âge de l'emprunteur en fin de prêt n'excède pas 85 ans. C'est désormais impossible. Quand bien même le taux d'endettement serait inférieur à 33%, la durée de remboursement d'un rachat de crédits ne peut outrepasser 25 ans. Il est plus difficile d'emprunter depuis la mise en œuvre des consignes du HCSF, il est aussi beaucoup difficile de se désendetter.
Les courtiers se sont maintes fois exprimés pour réclamer une réforme de la méthode de calcul des taux de l'usure, également la suppression, au moins temporaire, des nouvelles conditions d'emprunt qui éloignent les emprunteurs les plus modestes, notamment ceux qui seraient éligibles au rachat de crédits pour assainir leur budget.