Au décès de son père, un fils refuse de rembourser le crédit immobilier contracté par ses parents, estimant que sa mère, désormais seule propriétaire du logement, doit s'acquitter de la dette. La Cour de cassation lui donne tort.
Engagement vis-à-vis du créancier
Un couple marié sous le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts achète un bien immobilier à crédit. Au décès du mari, un des deux enfants, le fils, accepte la succession du père dont l'actif se compose uniquement de biens propres, sans recevoir aucun élément de la communauté. Le prêt qui est une dette de la communauté cesse d'être payé, la banque prononce alors la déchéance du terme et inscrit des hypothèques judiciaires sur des biens et des droits immobiliers appartenant à l'époux décédé. Le fils refuse de rembourser le solde du prêt, estimant que cette dette qui appartient à la communauté revient de fait à sa mère, puisque le régime matrimonial prévoit une clause d'attribution intégrale de ladite communauté au conjoint survivant. Etant donné qu'il n'a reçu que les biens propres de son père, il en déduit que seule sa mère est redevable des échéances restantes du prêt lié au logement dont elle est désormais l'unique propriétaire.
La Cour de cassation infirme l'arrêt de la Cour d'appel qui a retenu dans un premier temps que l'épouse est seule débitrice du solde du prêt qui est une dette de la communauté. Les juges rappellent que les héritiers ne peuvent échapper à la dette commune quand bien même ils auraient uniquement hérité des biens propres du parent décédé. S'ils reconnaissent l'obligation pour le conjoint attributaire de la totalité de la communauté de s'acquitter de toutes les dettes, celle-ci n'a pas pour effet de soustraire le patrimoine propre de l'époux prédécédé dès lors que ce dernier a engagé les biens communs et ses biens propres à l'égard du créancier. La Cour de cassation s'appuie sur l'article 2284 du code civil qui définit le droit de gage général des créanciers : « Quiconque s'est obligé personnellement, est tenu de remplir son engagement sur tous ses biens mobiliers et immobiliers, présents et à venir ». En acceptant l'héritage des biens propres de son père, le fils hérite aussi de la dette commune dont fait partie le crédit immobilier.
Assurance de prêt : protection en cas de décès de l'emprunteur
Cette affaire rappelle le droit des créanciers. Elle ne fait pas mention de l'assurance de prêt, même si on peut tout à fait supposer que les époux emprunteurs en avaient souscrit une. L'assurance intervient en cas de défaillance du ou des emprunteurs, notamment et surtout si l'un décède. Le capital restant dû est alors pris en charge par l'assureur en fonction de la quotité assurée : 100% sur chaque tête pour une protection optimale ou selon la contribution de chacun au prêt (40/60, 80/20, 50/50, etc.). Rappelons toutefois que la dette constituée par le crédit immobilier ne s'éteint pas au décès d'un des co-emprunteurs. Le conjoint survivant, mais également les héritiers dès lors qu'ils ont accepté la succession, sont tenus d'assumer les mensualités du prêt en attendant l'intervention de l'assureur, ce qui peut prendre plusieurs mois.
réf : Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 3 octobre 2018, 17-21.231