La journée mondiale de lutte contre le Sida célébrée le 1er décembre dernier nous donne l’occasion d’aborder la problématique de l’accès au crédit et à l’assurance pour les personnes touchées par ce virus. Les progrès de la médecine et la performance des traitements ont permis d’améliorer le parcours des séropositifs ayant un projet immobilier. La réglementation encadrant l’assurance emprunteur a par ailleurs évolué en 2022 en supprimant le questionnaire de santé sous certaines conditions.
VIH/Sida : risque aggravé de santé en assurance emprunteur
Chaque année, en France, on recense environ 6 000 nouvelles contaminations par le VIH (Virus de l’Immunodéficience Humaine). L’infection par le VIH est une affection chronique qui attaque le système immunitaire du corps, devenue parfaitement maîtrisable grâce au traitement, mais le délai entre l’infection par ce virus et son diagnostic est souvent long, notamment en France où il peut attendre trois ans.
Si aucun traitement ne permet d’éliminer complètement le VIH de l’organisme, les médicaments de nouvelle génération permettent de bloquer la multiplication du virus, de garder un système immunitaire opérationnel, permettant aux personnes infectées de vivre quasiment normalement. L’espérance de vie d’une personne séropositive sous traitement est désormais proche de celle de la population générale.
Malgré les progrès de la médecine, le Sida reste une maladie grave et stigmatise les personnes touchées qui souhaitent concrétiser un projet immobilier. Lorsqu’il s’agit de contracter un crédit à l’habitat, se pose inévitablement le problème de l’assurance emprunteur.
Le questionnaire de santé assurance de prêt en cas de VIH
L’assurance emprunteur vise à sécuriser les sommes prêtées en cas de défaillance de l’assuré victime d’un aléa de la vie. Elle prend en charge tout ou partie des mensualités suite au décès, à la perte d’autonomie, à l’invalidité ou à l’incapacité du souscripteur. Les compagnies d’assurance emprunteur considèrent les personnes porteuses du VIH comme des profils à risques aggravés, raison pour laquelle l’accès à l’assurance de prêt reste compliqué et répond à une procédure spécifique.
Les emprunteurs concernés relèvent de la convention Aeras (s’Assurer et Emprunter avec un Risque Aggravé de Santé), un dispositif opposable aux banques et aux assurances qui facilite l’accès au crédit et à l’assurance de prêt aux personnes touchées par la maladie ou handicapées. Pour en bénéficier, la demande de financement ne doit pas excéder 420 000€ (hors prêt relais) pour un solde arrivant à échéance avant le 71ème anniversaire de l’emprunteur. La couverture de l’assurance est d’une durée maximale de 25 ans.
La convention Aeras a mis en place une grille de référence qui contient 2 parties :
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La partie I, relative aux pathologies à déclarer à l’assureur qui permettent l’accès à l’assurance à des conditions d’acceptation sans surprime ni exclusion sous réserve de répondre à certains critères ;
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La partie II, relative aux pathologies à déclarer à l’assureur qui permettent l’accès à l’assurance à des conditions d’acceptation se rapprochant des conditions standards (avec surprime plafonnée) si elles répondent à certains critères.
L’infection par le VIH relève de la partie I. Le VIH n'est pas éligible au droit à l'oubli contrairement au cancer et à l'hépatite C après 5 ans de guérison et sans rechute.
Les informations à fournir en cas de séropositivité
Tout emprunteur, quel que soit son état de santé, remplit un questionnaire de santé assurance de prêt immobilier qui va permettre au médecin-conseil de l’assureur d’analyser le niveau de risques et de formuler une réponse assurantielle. En cas de VIH, des informations complémentaires seront demandées :
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date de dépistage du Sida
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rapport du médecin (évolution du VIH, état actuel, présence de maladies opportunistes)
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comptes-rendus des consultations de suivi et d’hospitalisation des 6 derniers mois
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copie de l’ordonnance de traitement médicale contre le VIH
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résultats des dernières analyses médicales.
Les emprunteurs séropositifs peuvent souscrire une assurance de prêt à des conditions standards un an après le début de leur traitement, sous réserve que les types histologiques et les stades de référence soient conformes aux critères suivants* :
- charge virale indétectable un an après l’instauration du traitement
- CD4 ≥ 500/mm3 et charge virale indétectable dans les 12 derniers mois précédant la souscription
- absence d’affection opportuniste en cours
- absence de co-infection actuelle par le VHB ou VHC
- absence de co-infection passée par le VHC, sans stade de fibrose strictement supérieurs à F2
- absence de maladie coronarienne et d’AVC
- absence de cancer en cours, ou dans les antécédents notés dans les 10 années antérieures
- absence d’arrêt de travail en cours et d’invalidité à la date de souscription
- bilan biologique de moins de 6 mois avec résultats dans les normes du laboratoire : hépatique (transaminases ALAT, ASAT, GGT) ; fonction rénale (DG), contrôle de la glycémie à jeun, bilan lipidique (exploration d’une anomalie lipidique)
- marqueurs viraux : marqueurs VHB (Ag HBs négatif, ADN viral négatif) ; marqueurs VHC (ARN viral négatif, avec recul de 24 semaines).
Si ces critères sont défaillants et que l’infection au VIH n’est pas stabilisée, l’assureur examine la demande d’assurance à un deuxième voire troisième niveau conformément à la procédure de la convention Aeras. Il est alors en droit :
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d’appliquer une surprime et/ou des exclusions de garanties,
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de refuser la garantie ITT (Incapacité Temporaire Totale de travail)
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ou d’opposer un refus d’assurance s’il estime les risques trop importants.
La loi Lemoine et la suppression du questionnaire de santé
L’assurance de prêt immobilier est désormais accessible sans questionnaire de santé si deux conditions sont réunies :
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La part assurée est inférieure à 200 000€ (plafond à 400 000€ pour les crédits immobiliers à deux avec une quotité assurance de prêt de 50% sur chaque tête).
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L’emprunt est remboursé avant les 60 ans de l’assuré.
Issue de la loi Lemoine, cette mesure permet à tous les emprunteurs malades qui remplissent des deux plafonds, quelle que soit la pathologie dont ils souffrent, de souscrire une assurance de prêt immobilier à des conditions standards similaires à celles accordées aux personnes en bonne santé, c’est-à-dire sans surprime ni exclusion de garantie.
La loi Lemoine permet aussi de changer d’assurance de prêt immobilier à tout moment et sans frais, sans attendre la date d’échéance. Ainsi, un emprunteur porteur du VIH dont les marqueurs viraux se sont améliorés peut résilier le contrat en cours et le substituer par une offre alternative moins chère, adaptée à son état de santé.
*Source : convention Aeras