La réforme 100% Santé est une avancée majeure pour tous les assurés français, car elle permet d’accéder à des équipements d’optique, des prothèses dentaires et des aides auditives sans reste à charge. Certains professionnels en audiologie y voient un filon à exploiter et abusent du dispositif au détriment des comptes de la Sécu et des mutuelles. En tant que patient averti, vous avez le pouvoir de vérifier que le prestataire respecte la réglementation.
Qui peut bénéficier du 100% Santé ?
La réforme du 100% Santé s’est déployée progressivement depuis janvier 2019 et permet de s’équiper en dentaire, optique et audiologie sans débourser un centime depuis janvier 2021. Toute personne bénéficiant d’une mutuelle santé dite solidaire et responsable (environ 95% des contrats de complémentaire santé) peut accéder à un large choix d’appareillages de qualité, intégralement remboursés par l’organisme et la Sécurité Sociale. L’objectif est d’améliorer l’accès à des soins souvent onéreux, habituellement très peu pris en charge par le régime général.
Le dispositif concerne les lunettes de correction (monture et verres), les prothèses dentaires (couronnes, bridges, dentiers) et les aides auditives. Dès lors que vous sélectionnez un produit du panier 100% Santé, vous n’avez aucun reste à charge après intervention d’Ameli et de votre mutuelle santé.
Rappelons que vous avez le droit de changer de mutuelle quand vous le souhaitez après un an de souscription. Mettez les offres en concurrence grâce à un comparateur de mutuelle santé : à garanties équivalentes, vous pouvez économiser jusqu’à 300€ par an.
Réforme 100% Santé en audiologie
Dans le cadre des prothèses auditives, le 100% Santé distingue deux catégories :
-
la catégorie I pour les équipements sans reste à charge
-
la catégorie II pour les équipements à prix libres.
Le professionnel a obligation de proposer à son client au moins un équipement du panier 100% Santé par oreille à appareiller via un devis normalisé. Les prestations de suivi sont obligatoirement comprises dans le prix d’achat de l’équipement.
Les prix des produits de la catégorie I sont plafonnés : l’audiologiste ne peut facturer plus de 950€ par appareil pour les adultes de plus de 20 ans et à 1 400 € pour les jeunes jusqu’à leurs 20 ans. Pour les produits de la catégorie II, le remboursement du reste à charge dépend du niveau de la garantie de la mutuelle, dans la limite de 1 700€ de prise en charge totale par oreille à appareiller, remboursements de l’Assurance maladie obligatoire et de la complémentaire confondus.
Pour les bénéficiaires de la Complémentaire Santé Solidaire, l’audioprothésiste est tenu de proposer des équipements de la classe I à un tarif plafonné à 800€ pour les adultes de plus de 20 ans et de 1 400€ pour les jeunes jusqu’à 20 ans.
Entre 2019 et 2022, le nombre de personnes appareillées est passé de 447 000 à près de 800 000, ce qui illustre la réussite de la réforme 100% Santé dans l’accès aux soins. Le dispositif a aussi favorisé l’émergence d’audioprothésistes qui y ont vu un moyen de s’enrichir facilement.
Les audioprothésistes dans le viseur de la Sécu
Dans une conférence de presse tenue début octobre 2023, la Caisse Nationale d’Assurance Maladie (CNAM) a fait état d’une recrudescence des fraudes opérées par des sociétés d’audioprothésistes, le plus souvent des entités récentes créées à partir de 2020. Le montant du préjudice est estimé à 150 millions d’euros rien qu’au premier semestre 2023, et les projections sont de 380 M€ sur l’année et de 500 M€ pour 2024.
Plusieurs anomalies ont été relevées suite à des signalements de patients et à des contrôles effectués par la CNAM :
-
facturations fictives : par exemple deux appareils et un seul fourni ;
-
absence de suivi : comme indiqué plus haut, les réglages sont inclus dans le tarif ;
-
prescriptions abusives : 24 ans d’âge moyen pour les patients, des personnes appareillées dans toute la France alors que les prescriptions venues quasiment toutes d’un même centre en Île-de-France ;
-
absence d’ordonnance obligatoire avant la demande de prise en charge des aides auditives.
L’absence de suivi n’est pas en soi une fraude mais peut indiquer des situations frauduleuses.
Le département de Seine-Saint-Denis affiche un taux de fraude de 17%, bien supérieur à celui constaté dans d’autres secteurs (entre 2,6 et 4 % pour les médecins spécialistes, entre 5,2% et 6,8 % pour les masseurs-kinésithérapeutes). 2 sociétés frauduleuses opérant dans le 93 ont cessé leur activité et sont poursuivies au pénal.
L’Assurance maladie va renforcer les contrôles, avec une attention particulière pour les bénéficiaires de la CSS, et a déjà mené une campagne de sensibilisation auprès des patients appareillés et des audioprothésistes, rappelant notamment le caractère obligatoire du suivi.