Finie la généreuse politique monétaire de la Banque Centrale Européenne. Pour la deuxième fois en moins de deux mois, l'institution relève ses taux directeurs pour freiner l'envolée de l'inflation en zone euro. Une bonne nouvelle pour les épargnants et un nouveau coup dur pour les emprunteurs, déjà bloqués par les taux d'usure. Explications.
Nette augmentation du taux de refinancement
Jeudi 8 septembre, la BCE a décidé d'augmenter de 75 points de base ses trois taux d'intérêt directeurs, après une première hausse de 50 points opérée le 27 juillet dernier depuis 2011. Cette mesure importante vise à anticiper la transition du niveau très accommodant des taux directeurs vers un niveau destiné à assurer le retour de l'inflation vers l'objectif de 2% que l'institution s'est fixé. En août sur un an, les prix se sont envolés de 9,1% dans la zone euro, du jamais vu depuis 2001 et la création de la monnaie unique.
Le taux de refinancement passe désormais de 0,50% à 1,25%. Ce taux est le principal taux des banques centrales et correspond aux taux des liquidités empruntées par les banques commerciales auprès de la BCE. Il a pour rôle de réguler l'activité économique par l'apport ou le retrait de liquidités. Les banques répercutent ensuite ce loyer de l'argent sur les intérêts des crédits accordés aux particuliers et aux entreprises, notamment le prêt immobilier qui concerne directement les primo-accédants et les investisseurs.
Quel impact sur le crédit immobilier ?
La BCE frappe fort en augmentant de manière radicale ses taux directeurs de 50 puis 75 points de base en quelques semaines. Les taux sont au plus haut depuis dix ans et ce mouvement pourrait ne pas s'arrêter là. Les observateurs s'attendent à de nouveaux relèvements du loyer de l'argent pour atteindre un taux neutre, soit entre 1,50% et 2%.
Les conséquences sur le budget des ménages sont variables. Les épargnants peuvent escompter un meilleur rendement de leurs placements, notamment sur les fonds en euros de l'assurance vie qui sont principalement constitués d'emprunts obligataires émis par les États. Toutefois, la revalorisation sera lente en raison de la forte inertie des fonds en euros. Le Livret A devrait également profiter du mouvement et voir sa rémunération progresser le 1er février 2023, date de sa prochaine révision.
Pour les ménages emprunteurs, ce nouveau bond du taux de refi de la BCE est un mauvais signal, même si les banques l'ont déjà en partie anticipé en procédant à une nouvelle hausse des taux en septembre 2022. Actuellement, le taux moyen du marché sur la durée classique de 20 ans s'affiche à 1,90% (hors coût assurance prêt immobilier et coût des sûretés), mais de nombreuses banques affichent des taux bien supérieurs à 2%, à quelques points du taux d'usure, qui indique le TAEG maximum que les banques ne doivent pas dépasser lors de l'octroi du financement. Pour rappel, le taux d’usure au T3 2022 s’établit à 2,57% pour les prêts d’une durée de 20 ans et plus.
Le crédit immobilier n'est plus rémunérateur et certaines banques ont décidé de ne plus prêter. Si les taux d'emprunt étaient ajustés au contexte monétaire actuel, ils devraient se situer autour de 3%, bien au-delà de l'usure, ce qui est interdit. La prochaine revalorisation du niveau de l'usure est vivement attendue.