Le nombre de logements neufs n'est pas suffisant pour combler la demande actuelle. Les promoteurs immobiliers s'agacent de la situation et déplorent, comme beaucoup de professionnels du secteur, le durcissement des conditions d'emprunt.
La crise de l'immobilier neuf
Au cours du premier trimestre 2020, les signatures de contrats de réservation dans le cadre de la VEFA (Vente en l'État Futur d'Achèvement) accusent un retard de 30% par rapport à la même période l'an passé (-25,2% en accession et -30,8% en investissement locatif). L'immobilier neuf est en crise et celle-ci n'est pas totalement imputable à la crise sanitaire qui sévit depuis mi-mars.
Le secteur du neuf montrait déjà des signes de faiblesse entre une demande toujours soutenue (plus de 160 000 logements vendus en 2019), mais en baisse (-3,3%), et une offre réduite de 15% sur un an. Le premier trimestre 2020 entérine la tendance observée en 2019, le confinement imposé par l'épidémie de Covid-19 ne pesant que sur les deux dernières semaines de mars. C'est pourtant la très forte baisse de l'offre qui inquiète les professionnels. Selon la FPI (Fédération des Promoteurs Immobiliers), les mises en vente ont reculé de moitié au premier trimestre 2020 par rapport au T1 2019 et de près de 18% sur un an, soit 15 000 logements en moins qu'en 2019 à la même période. Il n'y a pas suffisamment de logements neufs sur le marché pour des raisons qui risquent de peser davantage dans ce contexte économique dégradé :
- délais trop longs pour l'obtention des permis de construire
- recours excessifs contre les permis obtenus
- coûts de construction trop élevés
- normes à respecter
- cherté du foncier.
L'attentisme qui prévaut en période électorale (municipales) a malheureusement accentué les résultats inquiétants du T1 2020. À moins d'un plan de relance efficace, le nombre de logements collectifs autorisés pourrait se contracter de 100 000 entre 2019 et 2020. Autre chiffre alarmant émis pas la FPI : si le recul des transactions reste à 30% pour 2020, l'année perdra 50 000 ventes de logements neufs, avec toutes les conséquences en termes d'emplois et de rentrées fiscales.
Assouplir les conditions d'emprunt pour soutenir l'immobilier neuf
Le constat est partagé par Nexity qui, par la voix de son PDG Alain Dinin, fustige la politique suivie par le gouvernement. "Le choc de l'offre" n'est pas au rendez-vous, en partie à cause des élections municipales, dont les deux tours ont été espacés de 15 semaines au lieu de 2, et du gel des permis de construire dans cet intervalle dû au blocage des administrations, également du manque de financement des élus pour assurer les transports et la construction d'écoles. Or, le renouvellement de l'offre ne suffit pas à répondre à la demande, identique en volume à ce qu'elle était avant le confinement, et quand la demande excède l'offre de logements disponibles, les prix explosent : +3,5% en six mois. Au regard des contraintes évoquées plus haut, cela n'est pas signe d'une bonne santé du marché.
L'impact de cette hausse des prix de l'immobilier neuf touche principalement les ménages avec des revenus modestes et moyens, bien souvent sans épargne disponible, déjà confrontés de plein fouet aux nouvelles conditions d'emprunt. Pour Alain Dinin, comme pour tous les professionnels de l'immobilier, le maintien des recommandations du Haut Conseil de Stabilité Financière témoigne du manque d'analyse des pouvoirs publics. En obligeant les banques à respecter la durée maximale d'emprunt à 25 ans et le taux d'endettement à 33%, le régulateur a, sans préméditation, contribué à réduire le volume des crédits immobiliers signés depuis le début de l'année et par répercussion le volume de transactions dans le neuf. Au-delà des ventes en VEFA, le nombre de maisons neuves vendues a plongé de 36% à fin avril sur trois mois en glissement annuel. Étant donné que la production de crédits immobiliers se concentre sur les emprunteurs les plus solvables qui achètent de fait les biens les plus chers, les prix de l'immobilier neuf poursuivent leur ascension.
Renforcer les dispositifs d’aide
La crise actuelle est sans précédent par son ampleur et l'importance des réponses à lui apporter. Les grands centres urbains ont besoin de logements neufs, la demande ne peut se contenter de logements anciens à rénover. Tous les ménages déconfinés ne vont pas fuir les villes pour s'installer à la campagne, même si cette tendance des citadins vers les zones rurales se confirme. Cela s'avérerait d'ailleurs contre-intuitif par rapport aux objectifs de développement durable, en raison d'une utilisation plus fréquente de la voiture pour se rendre sur son lieu de travail. Il faudrait 400 000 logements neufs par an pour satisfaire la demande. Si rien n'est fait, l'année 2021 sera elle aussi en souffrance avec un déficit de 100 000 unités.
Dans une période où le pouvoir d'achat des Français se réduit, il semble urgent de repenser les dispositifs d'aide à l'achat dans le neuf, à savoir le PTZ pour les primo-accédants, le Pinel pour les investisseurs locatifs et l'APL Accession pour les foyers à revenus modestes.