Voici près d’un an et demi que les taux d’intérêts augmentent, pas un mois sans qu’ils ne gagnent quelques points. Résultat, la capacité d’emprunt des ménages se réduit et la baisse des prix des logements, qui pourrait être une variable d’ajustement, est encore trop timide. Attendre 2024 est-il la solution pour espérer bénéficier de conditions plus favorables ? Quelles sont les prévisions des notaires quant à l’évolution du marché immobilier ? Un récent sondage indique que plus de la moitié des vendeurs souhaitent vendre au plus vite par crainte d’une dégradation de la situation.
Jusqu’où iront les taux d’intérêts des crédits immobiliers ?
Selon l’Observatoire Crédit Logement/CSA, le taux moyen toutes durées confondues s’est établi à 3,15% en avril dernier (hors assurance de prêt immobilier et coût des sûretés), soit 11 points de base additionnels par rapport au mois précédent. Depuis janvier 2023, les taux ont gagné en moyenne 20 points par mois, une accélération en partie due à la mensualisation du taux d’usure depuis le 1er février 2023.
Dans le détail, le taux moyen distribué par les banques en avril a été de 3,21% sur 20 ans et de 3,38% sur 25 ans, toujours hors assurance emprunteur et autres frais annexes. L’Observatoire précise que sur 25 ans, qui est la durée maximale réglementaire, les taux étaient supérieurs à 3,50% pour la moitié des emprunteurs, pouvant même aller au-delà de 4% pour les profils les moins bien dotés en apport personnel. Avec un taux d’usure à 4,52% en mai 2023, la marge est bien mince pour intégrer dans le TAEG (Taux Annuel Effectif Global) tous les autres frais liés à l’obtention du crédit immobilier.
En seize mois, les candidats à l’emprunt ont vu les taux d’intérêts tripler, ce qui réduit leur capacité d’endettement de 20%. La production de crédits immobiliers s’en ressent et chute de 40% à fin avril 2023 en glissement annuel. La crise de l’immobilier 2023 n’en est qu’à ses débuts. Les courtiers pronostiquent des taux à 4% à l’approche de l’été 2023, et certains craignent qu’ils franchissent les 4,50% d’ici décembre.
Une baisse des prix immobiliers qui se fait attendre
Dans un marché en perte de vitesse, après avoir battu des records en 2021 en termes de transactions, les prétendants à l’achat immobilier parient sur une baisse des prix, mais la patience est de rigueur. Dans leur dernière note de conjoncture, les Notaires de France chiffrent les ventes dans l’ancien à 1 083 000 sur un an à fin février 2023, mais le volume devrait se situer sous la barre du million en fin d’année.
Les prix progressent toujours, à +4,8% sur un an pour l’ensemble du territoire (hors Mayotte) et à +6% en province. Les projections des avant-contrats à fin mai 2023 laissent présager une baisse des prix à venir. À fin mai 2023, les prix ne seraient plus qu’en très légère hausse de +1,3% sur un an.
Qu’en sera-t-il à la fin de l’année ? Chez SeLoger et Meilleurs Agents, on anticipe une légère baisse, quand d’autres tablent sur un recul de l’ordre de 5% à 7% pour l’année 2023. Le marché immobilier est en phase de retournement en 2023, mais compte tenu de son hétérogénéité, l’évolution sera variable d’une zone à l’autre.
Si les prix montrent des signes de faiblesse dans les métropoles, il n’en est rien dans les villes moyennes et en zones rurales où l’effet post-Covid perdure. Ceux qui attendent pour concrétiser leur projet immobilier pourraient en faire les frais, car la baisse des prix immobiliers, si tant est qu’elle soit significative, ne compensera jamais la hausse des taux d’emprunt. Il faudrait une contraction des prix de 25% pour phagocyter l’inflation opérée sur les taux depuis le printemps 2022.
Les acheteurs ont la main
Les vendeurs commencent tout juste à percevoir la réalité du marché. Selon le dernier baromètre sur les projets d’achats et de ventes des Français réalisé par l’Ifop pour le réseau de conseillers immobiliers indépendants Optimhome, 56% des propriétaires sont prêts à accélérer leur projet de vente en raison de la dégradation des conditions de financement, également du durcissement des règles relatives au diagnostic de performance énergétique. Ils se disent inquiets de voir les acheteurs potentiels se raréfier et craignent une baisse des prix face à une demande qui peine à accéder au crédit bancaire.
Ce même sondage indique que 26% des Français envisagent d’acheter un bien immobilier dans les 12 prochains mois, contre 29% en mars 2022. Les acheteurs sont donc en position de force pour négocier, les vendeurs ayant tout intérêt à fixer un prix qui soit cohérent avec le marché pour éviter de subir à l’avenir des conditions moins favorables.