Se lancer dans un projet immobilier en solo est plus compliqué qu’à deux : les revenus et l'apport personnel sont souvent plus faibles dans un contexte de prix toujours élevés et de règles d'octroi restrictives qui s'appliquent à tous. La part des emprunteurs achetant seuls a diminué en 2021 selon l'Observatoire Mon 1er Achat SeLoger & Empruntis. Seulement 4 candidats sur 10 parviennent actuellement à obtenir leur financement bancaire. Et ce n'est pas la hausse récente des taux qui va faciliter la démarche des futurs accédants.
Célibataire versus couple
L'étude menée par SeLoger, site spécialisé dans la diffusion d'annonces immobilières, et le courtier Empruntis s'est intéressée aux conditions d'accès au crédit réservées aux personnes qui ont acquis un bien immobilier seules en 2021. Tout le monde n'est pas logé à la même enseigne, les banques se révèlent plus tatillonnes avec les célibataires qu'avec les couples.
Alors que 5 candidats vivant seuls sur 10 arrivaient à décrocher un emprunt immobilier en 2019, ils ne sont plus que 4 sur 10 aujourd'hui. Les célibataires paient le fait d'être seuls pour mener à terme un projet immobilier, car vivre en solo signifie, en général, des revenus moindres que ceux des couples.
En moyenne, les célibataires gagnent 3 873€ bruts par mois contre 5 264€ pour les couples du même âge. Leur capacité d'endettement est alors diminuée : ils peuvent emprunter en moyenne 185 223€ contre 253 137€ pour les couples, un montant inférieur de 36%. La durée de remboursement se situe à 21 ans, c'est-à-dire un peu plus que la moyenne des crédits immobiliers qui s'établit à 20 ans et 1 mois selon l'Observatoire Crédit Logement. La relative faiblesse des taux d’intérêt permet de compenser les prix élevés de l’immobilier en empruntant sur une durée plus longue.
L'étude pointe également l'exigence d'apport personnel, supérieure pour les célibataires. Ils doivent en moyenne miser 63 657€, soit 34% du montant emprunté et une hausse de 4,6% sur un an, alors que l'apport personnel moyen observé chez les couples se situe autour de 11% du montant du prêt.
La crise sanitaire a renforcé la vigilance des banques. Deux revenus sont toujours plus rassurants qu'un seul. En cas de perte d'emploi, le risque est divisé par deux. Pour rester dans les clous de l'endettement, à savoir 35% maximum des revenus nets (assurance incluse), les emprunteurs doivent mobiliser davantage d'apport personnel, surtout s'ils sont seuls dans l'aventure.
Résultat, les primo-solos, c'est-à-dire les célibataires qui achètent pour le première fois, étaient moins nombreux en 2021. Leur part a baissé de 7 points par rapport à 2019. Parmi les emprunteurs en solo, 17% sont des secundo-accédants.
Autre problème que ne révèle pas l’étude : emprunter seul signifie supporter seul le poids de l'assurance de prêt immobilier. À deux, le coût de l’assurance est réparti sur chaque tête, au bas mot à 50% du montant emprunté pour chacun. Un célibataire doit assumer une couverture 100% du montant du prêt.
L'immobilier ancien privilégié
Les acheteurs en solo jettent leur dévolu sur les biens anciens. Près de 78% acquièrent dans l'ancien, contre 22% dans le neuf, dont 4% qui font construire. À 56% le bien acquis concerne un appartement.
Et qui dit ancien, dit généralement travaux. 25% des emprunteurs célibataires se lancent dans des travaux de rénovation d'un montant moyen de 46 141€ soit près de 25% du montant emprunté. Seuls 15% bénéficient d'un PTZ d'un montant moyen de 50 654€. Pour rappel, le PTZ est un prêt aidé à taux zéro, réservé aux primo-accédants de leur résidence principale.
Quant à la localisation du logement, un tiers des célibataires portent leur choix sur les villes moyennes, où l'immobilier est en général plus abordable que dans les grands centres urbains. Logiquement, ils restent toujours près de leur emploi, raison pour laquelle une majorité s'installe en banlieue des grosses métropoles comme Paris, Lyon, Toulouse, Nantes ou encore Marseille.
L'immobilier, valeur refuge sur fond de taux en hausse
Que pensent les primo-solos du marché immobilier ? 46% estiment que c'est le bon moment d'acheter contre 43% des acheteurs en général. Si l'immobilier constitue toujours une valeur refuge, 28% s'engagent pour réaliser un placement. L'étude indique que "la crise a d'ailleurs amplifié le sentiment d'opportunité sur le marché de l'immobilier : 61% des primo-solos affirment avoir plus tendance à considérer l'immobilier comme une valeur sûre en matière de placement depuis la crise du coronavirus".
31% ont tendance à penser que leur pouvoir d'achat va s'améliorer, mais une majorité penche pourtant pour une augmentation des prix dans les 6 prochains mois (67%). Quant à ceux qui portent un projet, 52% ont confiance de le mener à terme dans les 6 prochains mois.
Dernier doute et non des moindres, 65% craignent une hausse des taux d'intérêt. Qui pourrait leur donner tort ? La situation montre que la tendance haussière est enclenchée. Les banques ont relevé leurs barèmes de taux en février, après avoir observé un statu quo quasi généralisé en janvier. La remontée brutale de l'inflation (3,6% sur un an) et la pression sur le rendement de l'emprunt obligataire de l'État français à 10 ans imposent un ajustement des taux d'intérêt des crédits immobiliers aux particuliers. Il est toujours propice d’emprunter, les taux étant largement inférieurs à l’inflation, avec une moyenne toutes durées confondues à 1,07% en janvier dernier (hors assurance et coût des sûretés).
Mais le mouvement n'est pas prêt de s'arrêter à cause du conflit armé russo-ukrainien qui fait peser une lourde menace sur l'économie mondiale et sur l'inflation en Europe en particulier. Face aux risques inflationnistes, la Banque Centrale Européenne sera prochainement amenée à relever ses taux directeurs, ce qui signifie un loyer de l'argent plus cher pour les banques et par capillarité, plus cher pour les ménages emprunteurs.