Tout emprunteur peut choisir librement l’assurance qui va couvrir son prêt immobilier. Ce droit a été introduit par la loi Lagarde il y a plus de dix ans, mais force est de constater que de moins en moins d’emprunteurs en profitent lors de leur demande de financement. Ils préfèrent mettre en pratique la loi Lemoine dans un deuxième temps et changer de contrat en cours de prêt. Voici un des effets pervers d’une réglementation qui prône le libre choix de l’assurance de prêt. Explications.
Quelle est la principale réforme de la loi Lagarde sur l’assurance emprunteur ?
La loi n°2010-737 du 1er juillet 2010, dite loi Lagarde, porte sur la réforme du crédit dans le but de renforcer les droits des emprunteurs. Elle encadre les conditions d’accès au crédit à la consommation, notamment le crédit renouvelable accusé de contribuer au surendettement. Elle comporte également un volet assurance en autorisant l’emprunteur à choisir librement l’assurance en garantie de son prêt conso ou immobilier.
Depuis le 1er septembre 2010, tout emprunteur a le droit de souscrire à l'assurance de son choix et de refuser la formule proposée par sa banque. La déliaison entre crédit et assurance introduite par la loi Murcef de 2001 est consolidée par la loi Lagarde.
Les emprunteurs peuvent ainsi mettre les offres en concurrence via les comparateurs en ligne et souscrire l’offre qui répond à leurs besoins au meilleur prix. En profitant de la délégation d’assurance, les emprunteurs peuvent réduire jusqu’à 60% le coût de leur assurance de prêt immobilier. La réglementation impose toutefois que le contrat délégué présente une équivalence de niveau de garanties avec la proposition bancaire.
Ce droit au libre choix du contrat d’assurance lors de la demance de prêt peine pourtant à s’exercer. L’immense majorité des emprunteurs souscrivent à l’assurance groupe de leur banque en dépit des économies avérées qu’ils peuvent réaliser en signant avec la concurrence. Le phénomène s’est accéléré avec l’entrée en lice de la loi Lemoine en 2022.
La loi Lemoine pour changer d’assurance en cours de prêt
Entrée en vigueur en juin 2022 pour les nouveaux crédits et en septembre 2022 pour les prêts en cours, la loi Lemoine permet à tous les emprunteurs de dénoncer le contrat d’assurance bancaire à tout moment, sans attendre la date d’échéance qui faisait foi avec les dispositifs précédents (loi Hamon et loi Bourquin). Les emprunteurs reprennent la main sur leur assurance crédit en s'appuyant sur cette nouvelle réglementation qui facilite la substitution de contrat. À la clef, des milliers d’euros d’économies sur la durée restante du crédit immobilier.
Chez le courtier Magnolia.fr, le gain moyen s’affiche à 10 000€ pour les quelque 50 000 emprunteurs accompagnés dans leur démarche de changement depuis septembre 2022.
La loi Lemoine est donc une réussite, si l’on en croît le bilan du Comité Consultatif du Secteur Financier sur la réforme de l’assurance emprunteur. Peut-on réellement parler de succès ? Les parts des assureurs alternatifs sont passées de 15,3% fin 2021 à 16,1% en mai 2023, date à laquelle s’arrête l’observation du CCSF. Le rapport a été conduit trop tôt sur une durée qui manque d’ampleur pour constater une vraie ouverture du marché grâce à la loi Lemoine.
Moins d’assurances déléguées sur les nouveaux crédits
La loi Lemoine est une formidable avancée pour les emprunteurs ; elle réussit là où les autres dispositifs censés faciliter le changement d’assurance ont échoué. En supprimant la contrainte temporelle, elle permet à la substitution d’assurance de prêt de progresser. Elle a pourtant un effet pervers : la mise en retrait de la loi Lagarde.
En 2023, 7,5% des nouveaux crédits immobiliers étaient couverts par une assurance externe, contre 9,3% en 2021, avant la mise en œuvre de la loi Lemoine.
Souscrire une assurance déléguée en première intention perd du terrain. Les emprunteurs ne se battent plus pour faire valoir leur droit au libre choix du contrat lors de leur demande de financement. Manque d’information, manque de temps pour chercher une offre alternative mais surtout pression de la banque, ils évitent de contrarier le prêteur qui ne se prive pas d’appuyer son assurance maison quand bien même elle serait plus chère que la concurrence.
La priorité des emprunteurs est d’obtenir leur prêt immobilier, quitte à souscrire à une assurance plus onéreuse… qu’ils peuvent résilier rapidement dans un deuxième temps. La loi Lemoine offre ainsi une meilleure protection aux emprunteurs les moins bien armés pour négocier avec leur banque au moment de la souscription du crédit.
Chez Magnolia.fr, le changement de contrat représente désormais 90% de l’activité, contre 70% avant septembre 2022. Dans la majorité des cas, la demande de substitution intervient dans la première année de remboursement, ce qui permet d’optimiser les économies, le coût de l’assurance étant calculé sur le capital restant dû.