L'engouement sans précédent en 2019 pour l'immobilier et pour le crédit qui le finance avait alerté le Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF) sur d'éventuelles dérives d'un endettement massif des ménages et un risque de déséquilibre des banques. Jusqu'à présent règle tacite, le taux d'endettement maximum à 33% devient la norme à respecter. Dans une recommandation en date du 20 décembre 2019, le HCSF en donne même une définition précise, ce qui ne manquera pas de modifier la distribution du crédit à l'habitat en 2020.
Le HCSF encadre la distribution du crédit immobilier
Inquiet pour la préservation de la stabilité financière, le HCSF, autorité chargée d'exercer la surveillance du système financier français, a demandé aux banques de faire preuve de prudence en respectant les bonnes pratiques usuelles en matière d'octroi des crédits immobiliers. L'organisme d'État souhaite prévenir une éventuelle dynamique excessive de l'endettement des ménages et recommande, dans sa note du 20 décembre dernier, de prendre en considération les deux critères suivants :
- le taux d'endettement doit être limité à 33% ;
- la durée d'emprunt ne devra pas excéder 25 ans.
La prise en compte conjointe de ces deux critères au moment de l'octroi du crédit s'ajoute à l'appréciation des risques faite habituellement par les établissements de crédit. Ces derniers devront s'y conformer et en aucune manière tenter de les assouplir. Toutefois, le HCSF est conscient que les conditions de crédit exceptionnelles qui prévalent depuis plusieurs mois facilitent l'accès à la propriété. Pour ne pas briser cette dynamique, l'autorité accorde une marge de flexibilité qu'elle encadre néanmoins strictement :
- jusqu'à 15% de la production trimestrielle des nouveaux crédits pourra s'écarter des critères cités plus haut ;
- cette souplesse autorisée devra s'appliquer au moins aux trois quarts à destination des primo-accédants et aux acquéreurs de leur résidence principale ;
- aux crédits octroyés dans le cadre de cette flexibilité, un endettement maximal de 7 ans de revenu est préconisé.
Le HCSF demande aux établissements de crédit et aux sociétés de financement de respecter strictement ces bonnes pratiques également dans le cas des rachats ou renégociations de crédit(s). Un suivi et des missions de contrôle seront mis en œuvre par l'Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution, l'organe de supervision français de la banque et de l'assurance.
Le nouveau calcul du taux d'endettement
Désormais le taux d'endettement à 33% devient un critère officiel, et non plus une règle tacite pratiquée depuis toujours par les banques avec des ajustements en fonction de la situation propre de l'emprunteur. Dans une notice jointe à sa recommandation de décembre, le HCSF apporte une définition du taux d'endettement qu'il nomme "taux d'effort" : ratio entre les charges annuelles d'emprunt associées à l'endettement total de l'emprunteur (ou des co-emprunteurs) et les revenus annuels.
Deux autres définitions sont précisées :
- les charges annuelles d'emprunt : correspondent à la somme des différents montants totaux, tels que définis au 9° de l'article L.311-1 du code de la consommation, due par l'emprunteur (ou co-emprunteurs) au titre du crédit immobilier et des autres prêts en cours pour une année donnée, soit le total des intérêts et des remboursements de capital sur une période d'un an.
- les revenus annuels : correspondent au revenu net avant impôt, soit le revenu net imposable majoré des abattements forfaitaires pris en compte et minoré des revenus exceptionnels non récurrents.
Ces précisions dans le mode de calcul du taux d'effort s'imposent désormais aux banques. Elles ne pourront plus évaluer le taux d'endettement à leur guise et y introduire une forme toute personnelle de géométrie variable, en particulier pour les profils aisés et les investisseurs locatifs.
Les conséquences pourraient être lourdes pour la production des prêts à l’habitat en 2020, et chacun sait que le marché immobilier est totalement dépendant de la capacité des ménages à se financer à crédit.