Du jamais vu ! Encore ! Pour la énième fois, les taux d'intérêts des crédits immobiliers ont cédé du terrain et établi un nouveau record à la baisse en novembre. L'année 2019 est décidément exceptionnelle par sa constance à chercher la performance de mois en mois. Le point sur les conditions d'emprunt en ce début décembre.
Les taux s'enfoncent de nouveau
En novembre, les taux des crédits à l'habitat sont tombés à 1,12% (hors assurance et coûts des sûretés), un nouveau bas historique selon les dernières données de l'Observatoire Crédit Logement/CSA. Le record du mois d'octobre est battu d'un point (1,13%), qui lui-même avait damé le pion à septembre de 5 points (1,18%). Ce repli semble anecdotique, d'autant que le rythme de cette baisse entamée en début d'année 2019 a ralenti au second semestre. Pourtant, chaque mois est scruté à la loupe, car la bonne santé du crédit est un indicateur économique majeur. L'année 2019 restera un millésime inégalé en matière de prêt à l'habitat.
Retour à janvier dernier pour mesurer la performance des taux. L'année avait débuté avec un taux moyen toutes durées confondues à 1,43%. Le mouvement baissier s'était alors mis en marche, à une allure régulière durant le premier semestre, de façon moins rapide ensuite. Le seul accroc aura été le mois de septembre qui remontera le niveau d'un point par rapport au mois précédent. Ainsi, depuis janvier 2019, les taux ont reculé de 30 points de base. Novembre est le 18ème mois consécutif où les taux d'emprunt sont inférieurs au rythme de l'inflation. Dans le détail, un emprunteur s'endette aujourd'hui à 0,87% sur 15 ans, à 1,04% sur 20 ans et à 1,30% sur 25 ans. Il y a tout juste quatre ans financer à crédit l'achat d'un logement sur 20 ans coûtait en intérêts 2,31% du montant emprunté.
Taux mini, durée maxi
Effet collatéral de taux au plancher, la durée moyenne de remboursement s'est allongée pour atteindre un niveau jamais observé par le passé : 230 mois en novembre (19 ans et 2 mois) contre 229 mois en octobre. Au-delà des minces fluctuations mensuelles, la durée moyenne des prêts bancaires est restée à peu près stable depuis janvier 2019. Elle s'est en revanche accrue de 21 mois depuis janvier 2017 et de 30 mois depuis le deuxième trimestre 2014.
En novembre dernier, près de 72% des prêts ont été conclus sur une durée de 20 ans et plus, et 40,3% à 25 ans et plus. L'Observatoire note toutefois un léger recul de la part de la production à 25 ans et plus, soit 0,6 point de repli par rapport à la situation du printemps dernier.
L'étirement de la durée moyenne d'emprunt est également à mettre au compte de la politique commerciale des banques. Selon l'Observatoire, les établissements de crédit ont assoupli leur exigence en matière d'apport personnel depuis fin 2018, ce qui a bénéficié à la dynamique du crédit. Après la pause estivale, la production a rebondi en septembre pour continuer ensuite sur sa lancée. Le nombre de prêts octroyés a augmenté de 6,2% sur un an en novembre, et la production de crédits de 11,1%.
Vers une nouvelle régulation du crédit immobilier
Cette situation sans précédent n'est pas du goût du Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF), l'autorité française chargée de la surveillance du système financier. L'instance placée sous l'égide du ministère de l'Économie s'inquiète des conséquences éventuelles d'une surchauffe, alertant les banques quant aux risques sur leur rentabilité. Elle craint en parallèle un endettement excessif des ménages. La grande consultation des acteurs du secteur que le HSCF a lancée en octobre vient de s'achever.
Il faudra attendre quelques jours ou quelques semaines pour savoir si les pistes déjà évoquées seront mises en place, parmi lesquelles une modification du calcul du taux de l'usure et un meilleur encadrement du taux d'effort ou taux d'endettement des ménages emprunteurs. Non réglementé, le taux d'endettement est fixé communément par la pratique bancaire à 33%, c'est-à-dire que la part des revenus du ménage consacré au remboursement des dettes (tous prêts confondus) ne doit pas excéder un tiers des ressources. Des ajustements à la marge sont appliqués en fonction des revenus de l'emprunteur. Les profils aisés peuvent ainsi s'endetter au-delà du seuil des 33% tout en conservant un reste à vivre tout à fait suffisant. Aujourd'hui, un candidat à l'emprunt sur 4 bénéficie d'un taux d'effort supérieur à 33%. À l'avenir, le régulateur pourrait obliger les banques à respecter ce seuil.