Ne présenter aucun apport personnel dans son prêt immobilier est encore possible mais réservé à quelques rares profils. Les banques se montrent plus souples avec les jeunes actifs à condition de respecter certaines règles.
Apport personnel : un usage bancaire
Il est entendu qu'il faut disposer d'un minimum de 10% de l'opération pour obtenir un financement bancaire dans le cadre d'un achat immobilier. Cette règle tacite n'a aucun fondement légal, aucune réglementation ne l'impose, à l'inverse des règles d'octroi qui limitent le taux d'endettement à 35% des revenus nets de l'emprunteur (assurance incluse) et la durée de remboursement à 25 ans (voire 27 ans pour un achat dans le neuf). Ces critères deviennent juridiquement contraignants à compter du 1er janvier 2022.
La présence d'un apport personnel minimum est un usage compris et accepté de tous : injecter des fonds propres dans un projet immobilier permet de diminuer le montant de l'emprunt, et donc de réduire l'endettement et la durée du crédit. L’apport personnel permet d’abaisser les risques pris par la banque.
Ces 10% représentent grosso modo les frais d'acquisition, communément appelés frais de notaire, couplés aux frais de garantie et de dossier. Avec cette mise minimale, la banque va financer 100% du montant de la valeur du bien. Un apport plus étoffé va renforcer la confiance du prêteur quant à la capacité d'épargne de l'emprunteur et surtout, lui garantir la sécurité en cas de revente précipitée entraînant une moins-value : la banque veut s'assurer de pouvoir récupérer l'intégralité des sommes prêtées.
Remontée du taux d'apport depuis 2019
Sous l'effet de la mise en œuvre des règles édictées par le régulateur financier depuis près de deux ans, on voit le niveau de l'apport personnel augmenter. Après plusieurs années de recul, le taux d'apport personnel est remonté de manière significative, ce qui génère un recentrage du marché du crédit vers les clientèles les mieux dotées. Selon le dernier rapport de l'Observatoire Crédit Logement, le taux de l'apport personnel était 31% supérieur à ce qu'il était au quatrième trimestre 2019, son point le plus bas jamais observé.
Sur les neuf premiers mois de l'année 2021, le niveau d'apport personnel a progressé de 12,4% par rapport à la même période en 2020, qui était déjà en hausse de 11,3% sur douze mois comparativement à 2019. Au troisième trimestre 2021, le taux d'apport était de 19,5% dans l'ancien et de 17,4% dans le neuf.
Sur la base des dossiers qu'il a accompagnés, le courtier en crédit immobilier Vousfinancer constate qu'il faut désormais poser près de 40 000€ sur la table contre 29 100€ en 2020. Le nombre de dossiers dotés d'un apport supérieur à 10% représente actuellement 36% des dossiers contre 28% l'an passé. Les emprunts sans apport personnel, c'est-à-dire des financements à 110%, sont désormais nettement moins courants qu'en 2019, année où les rênes étaient lâchés, ce qui a conduit le Haut Conseil de Stabilité Financière à mettre le holà pour prévenir les risques d'endettement excessif des ménages.
Favoriser l'emprunt des jeunes
Emprunter sans apport personnel n'est donc plus un scénario habituel, mais certaines banques continuent de financer des projets sans ce sésame. Chez Vousfinancer, 64% des dossiers n'ont pas les 10% a priori exigés. On constate qu'il est tout à fait possible de décrocher un financement avec un apport limité, voire inexistant si tous les signaux sont au vert (bon diplôme, revenus suffisants, secteur économique porteur, comportement financier sain).
Difficile en effet de poser les 30 000€ ou 40 000€ nécessaires pour obtenir l'aval de la banque quand on est un jeune qui débute dans la vie active. Pas de recul suffisant pour s'être constitué une épargne, même minime, pour engager un projet immobilier. Les banques en ont bien conscience et font preuve d'une plus grande souplesse avec les jeunes actifs qu'avec les quarantenaires ou cinquantenaires dont l'historique professionnel doit logiquement leur avoir permis de mettre de l'argent de côté.
D'autant que les banques peuvent s'affranchir à la marge des règles d'octroi et accorder des financements au-delà des limites autorisées aux primo-accédants qui achètent leur résidence principale. Les établissements restent toutefois vigilants quant à trois autres paramètres :
- le reste à vivre qui mesure la somme dont dispose le foyer emprunteur une fois rembourser ses divers crédits ;
- le saut de charge qui est la différence entre le montant du loyer actuel et la future mensualité ;
- une épargne résiduelle de quelques milliers d'euros qui doit permettre de pallier un coup dur.
Certains coups de pouce peuvent aider à faire passer une demande de financement immobilier sans apport :
- le prêt Accession d'Action Logement : jusqu'à 40 000€ au taux de 0,5% (hors assurance obligatoire) pour un achat dans le neuf, la construction ou l'acquisition d'un logement HLM ;
- cette aide est cumulable avec un prêt travaux sur le même bien après acquisition et avec le prêt d'accession sociale (PAS) dont le montant maximum n'est pas plafonné.
Investir sans apport : possible mais compliqué
Les ménages déjà propriétaires de leur résidence principale pouvaient facilement investir sans apport personnel jusqu'à fin 2019. Depuis la mise en place des consignes d'octroi, l'exercice est nettement plus ardu, car il faut impérativement respecter le plafond de l'endettement (35%), ce qui est parfois mission impossible quand on rembourse déjà un premier emprunt sur le domicile principal.
Autre obstacle pour les investisseurs immobiliers, l'arrêt du calcul de l'endettement selon la méthode différentielle qui consistait à déduire les revenus locatifs futurs de la mensualité du crédit. Le retour à la méthode conventionnelle, où les loyers pondérés sont ajoutés aux revenus, plombe le taux d'endettement qui outrepasse bien souvent la limite admise.