30 000 euros ! C'est désormais le montant moyen de l'apport personnel nécessaire pour décrocher un crédit immobilier. Ce chiffre avancé par le courtier Finance Conseil est en progression de 13% sur un an. Il peut être nettement plus élevé en fonction de la région, comme en Île-de-France en raison de la cherté des logements.
Apport personnel : sésame pour emprunter
Si vous envisagez d'acheter un bien immobilier, il faudra montrer patte blanche et apporter de sérieuses garanties à votre banquier. Les critères cardinaux de solvabilité, c'est-à-dire la capacité de l'emprunteur à rembourser ses dettes, sont :
- un niveau des revenus suffisant
- un emploi stable en CDI, de préférence avec ancienneté
- un taux d'endettement sous le seuil autorisé (35%) après octroi du prêt
- un apport personnel significatif.
L'apport personnel se définit comme la part de financement de votre projet immobilier dont vous disposez sans avoir recours à l'emprunt. Cette mise initiale vient diminuer le montant de la somme empruntée, réduisant ainsi le risque pris par la banque. Plus l'apport est important, moins le capital emprunté sera élevé, ce qui implique une mensualité du crédit moins importante ou une durée de remboursement plus courte.
L'apport personnel témoigne aussi de votre motivation à vouloir concrétiser votre projet en mobilisant une partie de votre épargne. Il peut être constitué de :
- vos économies,
- des placements financiers que vous avez pu effectuer (livrets, comptes d'épargne, assurance vie, etc.),
- de votre épargne retraite qui peut être débloquée par anticipation en cas d'acquisition de la résidence principale,
- d'une donation ou d'un héritage.
La présence de l'apport personnel n'est pas une obligation légale pour obtenir un financement bancaire. Avant 2020, les établissements de crédit distribuaient des prêts immobiliers sans apport, aux jeunes primo-accédants et aux investisseurs locatifs notamment. Une règle tacite prévalait toutefois : poser sur la table au moins le montant des frais de notaire et de garanties, soit environ 10% dans l'ancien et 5% dans le neuf.
Cette période est révolue. Pour décrocher un prêt immobilier auprès d'une banque, il faut désormais être en capacité de présenter en moyenne 30 000€ d'apport personnel, 29 405€ pour être exact, contre 25 888€ en 2020.
L'an dernier, le montant moyen d'une transaction immobilière sur le territoire national était de 230 000€ (chiffre MeilleursAgents). Si on applique une hausse moyenne des prix immobiliers de 6% à fin mai 2021 (Notaires de France), il faut un budget de 243 800€ pour acheter un logement en 2021. Le taux de l'apport personnel atteint donc désormais 12,30% du montant d'une opération.
L'étude du courtier ne fait que confirmer ce que les autres professionnels observent depuis plusieurs mois. Selon les dernières données mensuelles de l'Observatoire Crédit Logement, le taux de l'apport personnel avait déjà progressé de 11% entre 2019 et 2020, une augmentation qui s'est accélérée en 2021 avec un sursaut de 12,4% depuis le début de l'année. Le courtier Meilleurtaux indique que les candidats à l'emprunt doivent gonfler davantage leur apport et que les profils mal dotés sont quasiment exclus du marché. Le temps des dossiers financés sans apport est bel et bien de l'histoire ancienne.
Un apport variable selon la région
Encore une fois, la moyenne cache des disparités régionales. Le marché immobilier français livre ici une parfaite illustration de son hétérogénéité. Le prix moyen du mètre carré oscille entre 746€ (Creuse) et 10 280€ (Paris) pour les maisons, et entre 905€ (Nièvre) et 11 252€ (Paris) pour les appartements (chiffres SeLoger). Les écarts sont immenses, ils suivent les mêmes proportions pour l'apport personnel.
source Finance Conseil
C'est en Bretagne que l'apport personnel est proportionnellement le plus important : il a augmenté de près de 10 000€ en un an. Un bond de 43,5% qui témoigne du dynamisme du marché immobilier breton. La crise sanitaire a dopé les régions littorales et les zones rurales, engendrant un déséquilibre offre/demande qui rehausse les prix, et par extension le niveau de l'apport nécessaire.
À l'inverse, l'apport recule dans trois régions, Provence-Alpes-Côte d'Azur, Auvergne-Rhône-Alpes et Nouvelle-Aquitaine, pour les mêmes raisons. Les acheteurs se sont détournés des grandes métropoles comme Bordeaux ou Lyon où l'immobilier est très cher, pour s'installer dans les villes périphériques où le marché est plus abordable.
Un apport personnel suffisant ne fait pas tout. Les banques cherchent davantage à sécuriser leurs financements en étant attentives à l’épargne résiduelle, soit environ 3 mois de salaires que l’emprunteur a pu mettre de côté pour faire face à un éventuel coup dur.
Les règles d'octroi à l'œuvre
Cette enquête sur l'apport personnel confirme à nouveau l'impact des restrictions de l'accès au crédit immobilier. Les recommandations du Haut Conseil de Sécurité Financière (HCSF) en place depuis janvier 2020 ont mis un nouvel obstacle dans le parcours des candidats à l'emprunt et ce n'est pas leur caractère juridiquement contraignant à compter de janvier 2022 qui va changer la donne.
Les banques n'ont plus le droit de distribuer des crédits immobiliers au-delà d'un taux d'endettement de 35% des revenus nets (assurance emprunteur incluse) et sur une durée excédant 25 ans (voire 27 ans pour un achat dans le neuf). L'élévation du niveau de l'apport personnel est la traduction de ces contraintes dont font les frais les jeunes actifs dépourvus d'épargne et les investisseurs locatifs, souvent déjà endettés avec leur résidence principale, qui comptent sur les loyers pour compenser la mensualité du crédit.