C'est désormais officiel : les conditions d'octroi des crédits immobiliers applicables à compter du 1er janvier 2022 sont inscrites dans le marbre, devenant juridiquement contraignantes. Les banques devront se conformer à la norme sous peine de sanction. Rappel de ces règles et de leurs conséquences pour les emprunteurs.
Le crédit immobilier strictement encadré
Émanant du Haut Conseil de Stabilité Financière (HCSF), la décision du 29 septembre 2021 relative aux conditions d'octroi des crédits immobiliers a été publiée au Journal Officiel du 10 octobre dernier. Elle reprend les recommandations édictées fin 2020, qui faisaient elles-mêmes suite aux premières consignes de l'hiver 2019 ayant pour objet d'éviter une surchauffe du crédit immobilier. Pas de surprise pour autant, car le HCSF avait annoncé il y a déjà plusieurs mois vouloir rendre les consignes d'octroi juridiquement contraignantes à compter de janvier 2022.
Outre leurs critères propres liés notamment à la solvabilité de l'emprunteur, les établissements de crédit doivent appliquer les critères d'octroi cumulatifs suivants :
- le taux d'effort ou taux d'endettement ne doit pas excéder 35% des revenus nets de l'emprunteur ;
- la maturité du crédit ne doit pas excéder 25 ans, ou 27 ans en cas de jouissance du bien décalée par rapport à l'octroi du financement (différé d'amortissement d'une durée analogue à celle de ce décalage, jusqu'à 2 ans + 25 ans d'amortissement du prêt).
Sont concernés par l'extension de la durée de remboursement à 27 ans maximum :
- les crédits immobiliers liés à une vente en l'état futur d'achèvement ou VEFA
- ceux liés à un contrat de construction d'une maison individuelle ou CCMI
- ceux liés à des acquisitions dans l'ancien donnant lieu à un programme important de rénovation (création de surfaces habitables nouvelles ou de surfaces annexes, modernisation, assainissement ou aménagement des surfaces habitables, rénovation énergétique) dont le montant est au moins équivalent à 25% du coût total de l'opération.
Le texte accorde une marge de flexibilité aux banques pour déroger à ces conditions d'octroi, pouvant aller jusqu'à 20% de leur production trimestrielle de nouveaux crédits. Cette souplesse doit concerner au moins à 80% les acquéreurs de leur résidence principale avec au moins 30% à destination de la clientèle primo-accédante. Les pourcentages restants sont libres d'utilisation.
Ne sont pas concernés par les critères d'octroi mentionnés plus haut :
- les prêts relais
- les crédits faisant l'objet d'une renégociation
- les crédits consentis pour le remboursement anticipé d'un crédit souscrit auprès d'un autre établissement (rachats externes)
- les regroupements de crédits.
Calcul du taux d'effort
L'article 4 apporte une définition précise des différents termes employés, notamment du taux d'effort et des charges annuelles d'emprunt :
- taux d'effort : ratio ayant pour numérateur les charges annuelles d'emprunt associées à l'endettement total de l'emprunteur ou des co-emprunteurs, comprenant le prêt considéré et les autres emprunts en cours, et pour dénominateur les revenus annuels ;
- charges annuelles d'emprunt : sommes des différents montants totaux dus par l'emprunteur ou les co-emprunteurs pour une année donnée, tels que définis au 9° de l'article L.311-1 du Code de la consommation (le remboursement d'un prêt relais est exclu des charges d'emprunt).
Les revenus annuels à prendre en compte pour calculer le taux d'endettement correspondent aux revenus nets avant impôt. L'article 4 est clair à ce sujet et n'offre aucune libre interprétation aux banques un peu trop zélées qui ont pu se permettre d'appliquer un taux d'effort de 35% après impôt.
En présence de revenus fonciers, le HCSF précise que "le revenu à prendre en compte est le revenu brut avant déduction d'éventuels abattements fiscaux et charges, y compris intérêts d'emprunts et assurance emprunteur, auquel il doit être appliqué des décotes par les établissements de crédit afin de refléter le risque locatif". Les revenus locatifs sont en général pris en compte à 70% de leur montant total.
En référence au 7° du même article L.311-1 et à l'article L.314-1 du Code de la consommation, le coût total du crédit, qui est exprimé par le TAEG (Taux Annuel Effectif Global), lui-même soumis au seuil de l'usure sur la durée concernée, comprend tous les coûts supportés par l'emprunteur et connus du prêteur à la date d'émission de l'offre de prêt, à savoir les intérêts, les frais, les taxes et les commissions ou rémunérations qui constituent une condition pour obtenir le crédit aux conditions annoncées.
L'assurance emprunteur fait bien évidemment partie des frais compris dans le calcul du coût total du crédit. Là encore, les banques n'ont plus de latitude pour exclure le coût de l'assurance dans le calcul du TAEG, ce qui leur permettait d'accorder des crédits immobiliers au-delà de la norme en vigueur à des clients pénalisés par un taux nominal peu performant ou par un taux d'assurance trop élevé en raison de risques supérieurs à la moyenne.