Si la proposition de loi est définitivement adoptée, dans un peu plus d'un an, il sera possible de changer de contrat d'assurance de prêt immobilier à tout moment. Cette opportunité de faire d'importantes économies ne concerne pas le crédit à la consommation dont font partie la plupart des prêts travaux et les éco-prêts à taux zéro. Explications de la députée Patricia Lemoine à l'origine de cette future réglementation.
Résilier à tout moment son assurance de prêt immobilier
Jeudi dernier, l'Assemblée Nationale a voté à la quasi-unanimité la proposition de loi "pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l'assurance emprunteur". Le texte prévoit de faciliter le changement d'assurance de crédit immobilier en accordant le droit au consommateur de résilier son contrat en cours de prêt à tout moment et sans frais. Aujourd'hui, la substitution d'assurance emprunteur dans le cadre d'un crédit immobilier est possible durant les douze premiers mois, au plus tard quinze jours avant la date d'anniversaire, et à chaque échéance en respectant un délai de préavis de deux mois.
L'exercice est difficile, car les banques cherchent par tous les moyens à retenir les clients et à les empêcher de souscrire une assurance alternative moins chère, et même beaucoup moins chère dans bien des cas. Les économies potentielles se chiffrent en centaines voire milliers d'euros pour chaque emprunteur sur la durée restante de son prêt. Chaque année, la faculté de pouvoir résilier à tout moment pourra permettre de redistribuer 550 millions à la communauté des emprunteurs.
Initié par la députée du groupe Agir ensemble Patricia Lemoine, le texte sera examiné au Sénat en janvier 2022 pour une adoption définitive avant la fin de la mandature et une mise en application un an après la promulgation de la loi.
Exit les prêts à la consommation
La perspective de pouvoir changer de contrat d'assurance à tout moment est une excellente nouvelle pour des millions de propriétaires qui remboursent un crédit immobilier. Cette ultime réglementation va enfin libéraliser le marché et leur permettre de faire jouer la concurrence plus aisément qu'avec les dispositifs actuels (loi Hamon et amendement Bourquin), constamment contournés par les bancassureurs. L'enjeu est de taille pour les prêteurs : conserver les 87% de parts de marché et continuer à encaisser des marges moyennes de 68%. Si elle ne bouleversera pas le marché, cette future loi permettra de mieux équilibrer les forces et de fendiller le monopole des banques sur le produit.
Cela ne vous a pas échappé que seules les assurances en couverture d'un prêt immobilier sont concernées par la résiliation à tout moment. Le texte ne prévoit pas cette faculté pour les crédits à la consommation.
Patricia Lemoine explique s'être "concentrée sur l'assurance emprunteur immobilier car c'était un pari déjà difficile", ajoutant que le prêt immobilier s'inscrit sur le long terme à l'inverse du crédit conso général souscrit sur une durée plus courte. Toutes les tentatives d'insuffler plus de concurrence dans le marché de l'assurance emprunteur avaient jusqu'à présent échoué. Ce nouvel essai, en passe d'être transformé, se focalise sur l'assurance de prêt immobilier car elle représente grosso modo 75% des cotisations annuelles en assurance emprunteur, les prêts à la consommation ne totalisant que 20% des primes (chiffres Fédération française de l'assurance).
La souscription à une assurance emprunteur n'est pas une obligation légale mais est systématiquement exigée dans le cadre d'un crédit immobilier en raison des sommes engagées et de la durée de remboursement (jusqu'à 25 ans). Elle est en revanche facultative pour un prêt conso dont le montant moyen est inférieur à 14 000€ pour une durée moyenne de remboursement entre 4 et 5 ans. L'impact de la résiliation à tout moment aurait été, il est vrai, limitée en termes d'économies potentielles pour l'emprunteur... sauf pour les prêts travaux comme l'éco-prêt à taux zéro dont les montants et les maturités peuvent atteindre des niveaux beaucoup plus importants.
L'assurance emprunteur de l'éco-prêt à taux zéro
L'éco-PTZ est un crédit sans intérêt qui permet de financer des travaux de rénovation énergétique. Le montant maximal est compris entre 7 000€ et 30 000€ selon la nature des travaux. Des caractéristiques qui nécessitent de sécuriser l'emprunt par la souscription à une assurance emprunteur. La banque l'exigera d'autant plus que la mise en place d'un éco-PTZ ne lui rapporte rien si ce n'est une lourdeur administrative. L'assurance va compenser l'absence de rémunération de ce prêt gratuit dont les intérêts sont pris en charge par l'État.
Faisons le calcul. Un ménage contracte un éco-PTZ d'un montant de 30 000€ sur 180 mois. L'assurance proposée par la banque est au taux de 0,38% soit une prime totale de 3 222€ pour une quotité à 100% sur chaque tête (sans risque médical ou professionnel connu). La délégation d'assurance permet de réduire le taux d'assurance à 0,14%, soit une économie non négligeable de 1 865€. Si l'opportunité de changer de contrat en cours de prêt était donnée à notre couple, la charge d'assurance serait réduite de plusieurs centaines d'euros selon la durée restante.
Le sujet de la résiliation à tout moment dans le cadre d'un éco-PTZ mérite réellement d'être débattu, comme le reconnaît volontiers Patricia Lemoine, d'autant que les parlementaires ont tout récemment rehaussé le plafond à 50 000€ et la durée à 20 ans à compter de 2022.