En première ligne pour la défense des consommateurs, l'association UFC-Que Choisir lance une action de groupe contre la banque LCL dont les pratiques empêcheraient les assurés de changer d'assurance emprunteur.
Au mépris de la réglementation
La loi autorise le changement d'assurance emprunteur en cours de prêt depuis 2014. Le dispositif a été inauguré par la loi Hamon qui permet de substituer le contrat initial à tout moment durant les douze premiers mois suivant la signature de l'offre de prêt. Il s'est renforcé en janvier 2018 grâce à l'amendement Bourquin qui entérine la résiliation/substitution annuelle à la date d'échéance.
Ces mesures, qui sont le prolongement logique de la loi Lagarde sur la délégation d'assurance, sont régulièrement bafouées par les banques, dont la main-mise sur le marché de l'assurance de prêt constitue, pour le moins, une aberration économique, et pour les consommateurs un déni de leur droit au libre choix du contrat.
Les assureurs alternatifs, ainsi que les courtiers spécialisés comme Magnolia.fr, sont les témoins habitués de ces indélicatesses pratiquées sans vergogne par les banques, et les font remonter au régulateur (Comité Consultatif du Secteur Financier) qui se charge, le cas échéant, de rappeler à l'ordre les fautifs. Le marché de l'assurance emprunteur représente environ 9 milliards de cotisations, une manne financière que les bancassureurs, en pôle position pour présenter leur offre d'assurance puisqu'ils sont aussi les distributeurs de crédits, ne veulent en aucun cas partager.
Après une décennie de lois en faveur de la liberté d’être assuré en-dehors de sa banque, 87% des assurances de prêt sont souscrites auprès des prêteurs, alors que les assurances alternatives sont jusqu'à quatre fois moins chères. Ces manquements de la part des établissements bancaires au respect de la réglementation prennent une dimension nouvelle avec l'action de groupe initiée le 12 novembre dernier par l'association UFC-Que Choisir devant le Tribunal Judiciaire de Lyon à l'encontre de la banque LCL.
Des milliers de clients empêchés de changer
Dans son communiqué, l'association indique avoir été alertée ces derniers mois par les manœuvres mises en place par LCL pour bloquer les demandes de changement d'assurance emprunteur. Les assurés témoignent du silence opéré par la banque lors d'une demande en délégation. La réglementation impose aux prêteurs de répondre au plus tard dans les 10 jours ouvrés après réception de la lettre de résiliation/substitution. Par ce silence qui entraîne de facto un dépassement du délai réglementaire, LCL rend le client captif pour une année supplémentaire, ce qui risque à la longue de le décourager définitivement de faire valoir son droit au changement.
L'association cite l'exemple d'un emprunteur qui n'a pu changer de contrat qu'au bout de 9 mois, après moultes relances auprès de la banque. Cette pratique dilatoire lui en a coûté 185€ de pouvoir d'achat. L'affaire prend même une tournure malhonnête quand un couple d'emprunteurs continue de se faire ponctionner les cotisations d'assurance bancaire alors qu'il est couvert depuis plus d'un an par un assureur concurrent. Bilan : 250€ perçus indûment par LCL.
Selon UFC-Que Choisir, ces deux pratiques, silence et poursuite des prélèvements, pourraient concerner des milliers d'emprunteurs clients de la banque LCL, pour un préjudice total qui s'élèverait à 1 million d'euros. Pour la plupart des ménages victimes de ces comportements délictueux, le tort représente quelques centaines d'euros.
La procédure engagée par l'association a pour but, si la banque est condamnée, de rendre public le jugement afin d'inciter les personnes lésées à rejoindre l'action de groupe pour obtenir réparation. LCL n'est pas le seul établissement bancaire à être dénoncé par les consommateurs, mais il est, à ce jour, celui qui cristallise le plus grand nombre de plaintes, car les deux manœuvres incriminées sont relativement faciles à caractériser.
Des pratiques abusives qui ne sont pas isolées
L'ironie du calendrier fait que l'action en justice menée par UFC-Que Choisir se télescope avec le bilan sur l'assurance emprunteur que le Comité Consultatif du Secteur Financier a publié cette même semaine. L'instance placée sous l'égide de la Banque de France met en lumière les obstacles dressés par les banques pour faire échec à la concurrence. À l'absence de réponse relative à la demande de substitution et aux prélèvements indus, s'ajoutent des procédés moins flagrants comme la réclamation superflue de documents ou l'ergotage autour de la date de résiliation.
L'adoption de l'amendement Bourquin II devrait résoudre en partie cette problématique. Le texte, qui entrera sans doute en vigueur au printemps prochain, prévoit une date d'échéance fixée à la date de signature de l'offre de prêt (ou tout autre date clairement stipulée dans le contrat) et l'obligation faite à la banque d'informer son client de cette date.