Dans un avis publié début octobre, le Haut Conseil de Sécurité Financière s'inquiétait d'une éventuelle surchauffe du marché immobilier en raison de l'endettement excessif des ménages et de la très faible voire invisible rentabilité des banques sur le crédit à l'habitat. Qu'en pensent les courtiers, professionnels du crédit et de l'assurance emprunteur ?
Surchauffe ou dynamique du crédit immobilier ?
Faut-il craindre une surchauffe du secteur immobilier compte tenu d'un recours massif à l'emprunt ? L'année 2019 est d'ores et déjà considérée comme un millésime exceptionnel avec un nombre de transactions record (plus d'un million sur douze mois), porté par des taux au plancher depuis janvier (1,12% en moyenne en novembre hors assurance). La machine du crédit tourne à plein régime, totalisant près de 1 200 milliards d'euros d'encours et un bond de la production de 11% sur un an fin novembre. Les Français se sont rués sur la pierre, principalement pour acquérir leur résidence principale avant d'investir pour en retirer des revenus locatifs. L'accès au crédit immobilier a été facilité par les taux excessivement bas, également par la politique commerciale des banques, toujours à l'affût du chaland, qu'elles ferrent à long terme grâce à l'emprunt. Les durées de remboursement se sont allongées et le taux d'apport personnel s'est réduit, des conditions d'emprunt assouplies, ce que dénonce le Haut Conseil de Sécurité Financière (HCSF) qui, dans une note publiée le 1er octobre dernier, faisait état des risques sur le secteur de l'immobilier résidentiel pouvant, à terme, fragiliser les banques et les emprunteurs. Ces craintes sont balayées par les établissements bancaires qui assuraient dans la foulée n'avoir en rien détendu leurs critères d'octroi. Le constat du HCSF n'est pas non plus partagé par le courtier Meilleurtaux qui, dans une tribune sur le site Boursier.com, expose toutes les raisons de garder confiance dans le système français du crédit, raisons partagées par Magnolia, acteur leader de la distribution des assurances de prêt.
Protections pour le prêteur et l’emprunteur
Premier argument, le système français est unique et totalement sécurisé, à l'inverse de ce qui se passe dans d'autres pays de la zone euro et ailleurs. Les risques de défaut de paiement sont infimes grâce à une écrasante majorité de prêts accordés à taux fixe sur toute la durée d'emprunt. Très peu d'emprunteurs ont recours au crédit immobilier à taux variable en raison du risque de renchérissement de ce type de financement en dépit du plafonnement (le cap entre 1% et 2% à la hausse comme à la baisse). En France, seuls 0,4% des prêts étaient souscrits à taux révisable durant l'année 2018. Parions que cette proportion régresse encore en 2019 à la faveur des taux fixes à des niveaux si faibles qu'ils oblitèrent définitivement l'éventuelle attractivité des taux variables.
Deuxième argument qui rassure quant à la saine activité du crédit immobilier dans notre pays, la quasi intégralité de la production se fait en prêts amortissables : chaque mensualité qui passe diminue le capital restant dû, contrairement au prêt in fine, plus cher en intérêts, qui consiste à rembourser la totalité du capital emprunté à l'échéance. Rappelons par ailleurs que les banques appliquent un ratio d'endettement limité à 33%, tout en vérifiant le reste à vivre et le saut de charge, à savoir les ressources dont dispose chaque mois le foyer emprunteur après acquittement de la dette et l'augmentation de la charge financière mensuelle qu'il va subir ou non avec l'achat du logement. Si, comme en témoignent les chiffres de la Banque de France (BdF), un emprunteur sur quatre s'est endetté au-delà de 35% en 2018, Meilleurtaux explique que ce ratio est réservé aux ménages à revenus élevés ou pour les opérations d'investissement locatif sécurisé par les loyers. Toujours selon la BdF, en 2018, le taux d'effort, soit le rapport entre les charges de remboursement liées à l'habitation et les revenus, était de 30,1%, et la sinistralité, c'est-à-dire la part des encours douteux de crédits immobiliers, était de 1,3%. Ajoutons qu'en plus de l'évaluation de la solvabilité de l'emprunteur, les banques françaises exigent que les prêts soient couverts par des dispositifs de garantie (caution, hypothèque, privilège du porteur de deniers).
Sécurité optimale avec l'assurance de prêt
La transition est toute trouvée pour aborder l'assurance emprunteur, autre mécanisme très puissant qui va garantir la bonne fin de tout emprunt immobilier. Paradoxe à la française, la souscription à une assurance de prêt n'est pas légalement obligatoire mais systématiquement exigée par le prêteur pour se protéger en cas de défaillance de l'emprunteur et offrir à ce dernier une sécurité essentielle en cas d'incident de la vie (décès, invalidité et incapacité). La France est depuis peu dotée d'une législation qui autorise le libre choix du contrat d'assurance-crédit (loi Lagarde de septembre 2010), tout en facilitant l'accès au crédit aux personnes incarnant des risques élevés compte tenu de leur état de santé (convention Aeras). Tout candidat à l'emprunt peut souscrire une assurance en dehors de la banque prêteuse pour être couvert selon ses besoins et à un coût inférieur. La mise en concurrence des offres peut se faire en amont de la demande de prêt, mais également durant la première année de remboursement (loi Hamon) et jusqu'au terme du crédit (amendement Bourquin).
Le crédit immobilier à la française dispose de tous ces garde-fous (taux d'endettement, garantie, assurance, taux fixes, prêt amortissable) qui offrent une sécurité indéniable aux établissements financiers comme aux emprunteurs. Les professionnels espèrent que la dynamique du marché immobilier observée tout au long de l'année 2019 se poursuivra en 2020.