C'est une des conséquences de l'épidémie de Covid-19 : le marché du viager séduit de plus en plus de personnes âgées, inquiètes par la situation sanitaire dans les maisons de retraite et les Ehpad. Toujours entachée de son image de "pari sur la mort", la vente en viager est aujourd’hui une excellente solution pour financer le maintien à domicile des seniors avec des ressources moyennes ou modestes.
Le viager, un marché de niche qui se développe
Malgré l'absence de statistiques officielles, les professionnels estiment que la vente en viager représente environ 1% des transactions immobilières dans l'ancien, soit entre 6 000 et 8 000 unités par an. Ce marché de niche connaît néanmoins un regain d'intérêt ces dernières années, avec une croissance annuelle de 5%. Selon le site spécialisé Renée Costes Viager, 90% des transactions sont réalisées en viager occupé, 56% concernent des maisons et plus d'une vente sur trois est intrafamiliale.
En frappant de plein fouet les Ehpad (Établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes), la crise sanitaire due au Covid-19 a bouleversé l'appréciation des seniors sur les maisons de retraite. Plus de 10 000 résidents sont décédés des suites du coronavirus, soit un tiers du nombre total de victimes. De plus en plus de personnes âgées se tournent alors vers la vente en viager occupé pour éviter de devoir partir en maison de retraite.
Dans un article paru sur le site internet de France Inter, Sophie Richard, fondatrice du réseau Viagimmo (14 agences spécialisés dans le viager), indique avoir réalisé plus de cinq ventes en viager dans les dix jours qui ont suivi le déconfinement, quand, en temps normal, le viager ne représente qu'une à deux transactions par mois. Certains de ses clients ont annulé la place en Ehpad qu'ils avaient réservée pour préférer le viager, même s'il faut adapter le logement aux contraintes de la dépendance.
Le viager occupé ou mieux vivre sa retraite
Près de 70% des Français ont une piètre opinion des Ehpad (chiffres Odoxa 2018), largement forgée par les cas isolés de maltraitance, abondamment relayés par la presse, et par les problématiques d'ordre affectif. La crise sanitaire qui prévaut en 2020 ne fait que creuser le fossé et accroître le manque de confiance de la part du grand public. Plus que les milliers de morts recensés dans les Ehpad en raison de l’épidémie de coronavirus, l'interdiction des visites des proches durant de nombreuses semaines a choqué au-delà des personnes concernées.
La population française vieillit, l'espérance de vie augmente et les pensions de retraite diminuent, entraînant une baisse du pouvoir d'achat des seniors. 75% des personnes de 60 ans et plus sont aujourd'hui propriétaires de leur résidence principale. Vendre en viager occupé est pour certaines d'entre elles le moyen d'améliorer leur retraite tout en conservant le droit d'usage et d'habitation du logement, quitte à engager des travaux pour répondre aux besoins spécifiques de santé.
Le bouquet reçu lors de la vente (environ 20% à 30% du prix du bien sur le marché) permet de financer ces améliorations du logement, et le rente viagère versée chaque mois permet aux revenus du crédirentier d'augmenter en moyenne de 50%. Pour l'acheteur, l'intérêt est triple : pas de souci de gestion des locataires, pas de revenus locatifs fiscalisés, et la valeur du bien décotée du fait de l'absence de valeur d'usage pour lui-même. Le montant de la rente est en effet calculée à partir de la valeur du logement diminuée du montant des loyers qui seraient normalement perçus pour un bien équivalent. La rente est ensuite déterminée en fonction de l'espérance de vie du vendeur, définie d'après les tables de mortalité de l'Insee.