Les affaires de squat défraient régulièrement la chronique et mettent en lumière l’inefficacité de la réglementation. Une proposition de loi anti-squat a été déposée lundi 28 novembre par les groupes de la majorité présidentielle. Le texte s’attaque à la fois aux squatteurs et aux locataires qui ne paient pas.
Sanctions renforcées contre les squatteurs
Le problème du squat n’est pas nouveau ; plusieurs fois dans l’année, les médias se font l’écho de propriétaires dans l’impossibilité de récupérer leur bien occupé illégalement. Les dernières dispositions en la matière datent de 2020 et visent à simplifier et accélérer la procédure de reprise des biens squattés auprès de la préfecture, mais certaines mesures ont été retoquées par le Conseil Constitutionnel qui les considérait comme des cavaliers législateurs (sans objet avec la loi concernée). Il fallait donc remettre le métier sur l’ouvrage et permettre à la réglementation d’aller plus loin pour que l’équilibre entre droit de propriété et droit au logement soit respecté.
Portée par les groupes Renaissance et Horizons, une proposition de loi examinée par l’Assemblée Nationale lundi 28 novembre entend tripler les sanctions encourues par les squatteurs, qui iraient ainsi jusqu’à 3 ans de prison et 45 000€ d’amende. Actuellement, un squatteur risque un an de prison et 15 000€ d’amende, tandis qu’un propriétaire victime d’un squatteur, qui change la serrure pour empêcher l'intrus de rentrer dans les lieux, est passible de 3 ans d’emprisonnement et de 45 000€ d’amende. Il y avait donc une distorsion dans l’échelle des sanctions, au détriment des propriétaires qui cherchent à sortir les squatteurs par eux-mêmes.
Le texte prévoit d’étendre la procédure accélérée d’expulsion sans recours à un juge aux logements vacants non meublés, par ailleurs promis à une lourde taxe en 2023, tout comme les résidences secondaires.
Lutter contre les loyers impayés
La proposition de loi s’empare également du sujet des loyers impayés. Certains propriétaires luttent durant des années pour récupérer leur dû et leur logement, malgré la résiliation du bail et une décision de justice visant à expulser les locataires mauvais payeurs. En cas extrême, le petit propriétaire bailleur, qui compte sur ses revenus locatifs pour boucler son budget, se retrouve lui aussi en situation de précarité.
Le fait que tant de propriétaires rechignent à louer leur bien ou préfèrent la location touristique, et que tant de bailleurs réclament caution, garantie pour le versement des loyers et un maximum de documents attestant de la solvabilité du locataire, illustre bien les difficultés à obtenir gain de cause en cas d’impayés de loyers. À l’initiative du texte, le député Guillaume Kasbarian, également président de la commission des affaires économiques, a rappelé que les deux tiers des propriétaires n’ont qu’un seul bien locatif.
Le texte contient également une mesure qui rend obligatoires les clauses de résiliation dans les contrats de bail. Ces mentions doivent provoquer la résiliation automatique du bail, lorsqu’un commandement de payer est resté infructueux.
Attention : contrairement à une idée reçue, un locataire en fin de bail qui reste dans le logement sans l’accord du propriétaire n’est pas considéré comme un squatteur.
Les réactions n’ont pas tardé. Les groupes LFI, communiste et écologiste sont vent debout contre cette proposition de loi qu’ils qualifient de « fabrique de SDF ». Du côté des associations, l’indignation est palpable. La fondation Abbé Pierre critique un texte qui va « permettre des expulsions en 48 heures, sans juge, de squatteurs qui occupent des logements vacants », et Attac dénonce une « loi antisociale » qui « criminalise les précaires ». L’examen de la proposition de loi, pour laquelle près de 250 amendements ont été déposés, continue toute la semaine.
Rappelons que le squat est un problème marginal en France, il y aurait moins de 200 affaires par an. Le texte ne touche pas à la question de la trêve hivernale qui s’applique du 1er novembre 2022 au 31 mars 2023 (au lieu du 15 mars les années précédentes) et qui interdit l’expulsion du locataire, sans pour autant suspendre une éventuelle procédure engagée. Ajoutons qu’en vertu de la loi ELAN, un squatteur ne peut plus se prévaloir de la trêve hivernale pour continuer d’occuper le logement illégalement.