Quiconque peut faire une donation d'un bien immobilier à la personne de son choix à condition de respecter la part des héritiers réservataires. Cet acte est-il possible si le donateur n'a pas terminé de rembourser le crédit qui a servi à financer l'achat de ce logement ?
Encadrement de la donation
Toute personne peut faire une donation, c'est-à-dire transférer de son vivant et gratuitement la propriété d'un bien au donataire de son choix, son conjoint, son ou ses enfants, tout autre membre de la famille, ou un tiers. Trois conditions doivent être respectées :
- être sain d'esprit
- être majeur ou mineur émancipé
- posséder la capacité juridique de gérer ses biens.
La donation peut concerner tout type de biens, maisons, appartements, terrains, meubles, bijoux, véhicules, œuvres d'art, sommes d'argent, etc. Le bien donné doit appartenir personnellement au donateur au moment de la donation. Il est impossible de donner un bien dont on héritera à l'avenir.
Règles de transmission
Si le donateur est libre de donner à qui il veut, il doit respecter les règles de transmission, c'est-à-dire que la valeur du bien donné ne doit pas dépasser la réserve héréditaire, ou quotité disponible, à savoir la part qui revient aux héritiers réservataires (enfant, ou en l'absence d'enfant, l'époux, à qui la loi attribue une part d'héritage minimale).
Comme pour toute transaction immobilière, la donation d'un bien immobilier est obligatoirement un acte notarié, de même que la donation avec réserve d'usufruit. Le notaire est en charge des démarches déclaratives.
Droits de donation
L'administration fiscale perçoit des droits de donation, éventuellement déduits d'abattement(s) : par exemple, un abattement de 100 000€ de parent à enfant sur une période de 15 ans, le montant restant de la donation étant assujetti à un barème d'imposition par tranche, jusqu'à 45% au-delà de 1 805 677€. Le donateur peut prendre les droits à sa charge, sans que cela soit considéré comme un supplément de donation.
Mais qu'en est-il d'un bien immobilier financé par un crédit qui n'est pas arrivé à son terme ? La donation est-elle possible et dans quelles conditions ?
Donation et crédit immobilier
Le propriétaire d'un bien immobilier peut en faire donation à la personne de son choix même si le crédit qui finance le logement n'est pas arrivé à son terme. L'opération est toutefois entourée d'un grand formalisme.
La propriété de l'appartement ou de la maison est transférée à la personne qui le reçoit en donation, la suite du prêt peut prendre quant à elle deux destinations :
- soit le donateur, souscripteur du crédit, continue de le rembourser jusqu'au terme prévu ;
- soit le prêt est transféré au donataire.
Le donateur continue de rembourser le crédit
Dans les deux cas, des précautions sont à prendre et tout dépendra de la situation personnelle de chacune des parties. Première option, la perte de propriété sur le bien donné va diminuer la situation financière du donateur, d'un point de vue patrimonial certes, mais aussi dans l'hypothèse où le bien était loué. Les loyers seront dorénavant perçus par le nouveau propriétaire.
La banque refusera la donation si les ressources du donateur s'avèrent insuffisantes. Si le prêt est couvert par une hypothèque, la banque peut faire jouer cette garantie et demander la vente du bien pour rembourser l'emprunt sur le prix de cette vente. En cas de cautionnement, l'organisme spécialisé remboursera la banque et se retournera contre le donateur pour récupérer son dû.
Le prêt est transféré au donataire
Pour la seconde option, le transfert du prêt sur le donataire implique l'accord de la banque. Il faut dans un premier temps qu'elle accepte de ne pas appliquer la clause dite d'exigibilité du prêt qui lui permet de réclamer le capital restant dû en cas de changement de propriétaire. Sa réponse est subordonnée à la solvabilité du nouvel emprunteur.
En cas d'acceptation, le nouveau propriétaire à qui incombe désormais le remboursement des sommes dues devra sécuriser le crédit avec une nouvelle assurance de prêt, puisque l'ancienne assurance étant nominative et appréciée à la nature des risques incarnés par l'ancien emprunteur ne peut couvrir le nouveau titulaire.
Les droits de donation sont calculés sur la valeur du bien réduite du montant du capital restant dû.
Donation et usufruit
Deux autres solutions peuvent être envisagées :
- vendre le bien immobilier, solder le crédit et verser le prix de vente en donation : cela implique de payer des indemnités de remboursement anticipé à la banque qui viendront en déduction des sommes données. Il s'agit dans ce cas d'un don manuel obligatoirement déclaré à l'administration fiscale et assujetti aux mêmes droits de donation que l'acte notarié pour un bien immobilier.
- la donation avec réserve d'usufruit : cette technique permet au propriétaire de conserver la jouissance du bien tout en réalisant sa transmission. Seule la nue-propriété est donnée. L'usufruitier continue d'occuper le logement ou d'en percevoir les loyers qui permettront de couvrir le remboursement du prêt.
La valeur de l'usufruit est calculée en fonction de l'âge de l'usufruitier, celle de la nue-propriété étant inversement proportionnelle. Au décès du donateur, l’usufruit s’éteint au profit du ou des donataires qui deviennent automatiquement pleins propriétaires, sans droit de mutation à acquitter en complément. Ceux-ci sont calculés sur la valeur de la nue-propriété au moment de la donation.
Avant de faire une donation d'un bien immobilier financé par un crédit en cours, il est vivement recommandé de solliciter les services d'un notaire pour envisager tous les cas de figure et définir le schéma le plus avantageux pour le donateur et le donataire.