Les Français s'endettent sur une durée moyenne de 20 ans pour acheter leur logement. Du jamais vu ! L'augmentation des prix immobiliers et l'encadrement rigoureux du crédit obligent les ménages à emprunter sur de plus longues durées, surtout les primo-accédants qui ont rarement les moyens de mobiliser un apport personnel conséquent. Le crédit est bon marché, mais les conditions pour y accéder restent drastiques.
Durée d'emprunt record
Selon les dernières données de l'Observatoire Crédit Logement, la durée moyenne d'emprunt immobilier a atteint 240 mois (20 ans) en novembre 2021, soit le record historique. Par rapport à octobre, c'est 7 mois de plus ! Et en regardant plus loin dans le rétroviseur, la durée a gagné 30 mois depuis janvier 2017 et 40 mois depuis le deuxième trimestre 2014. Au début des années 2000, la durée moyenne du crédit immobilier était de 161 mois (13,41 ans). À l’époque, le taux nominal d’emprunt était à plus de 5%.
Le marché du crédit à l'habitat comptabilise une nouvelle performance inédite, après le niveau historiquement bas des taux d'intérêt et le volume de transactions (1,2 million sur un an au troisième trimestre 2021).
Taux maintenus au plancher
Toujours selon l'Observatoire, le taux moyen toutes durées confondues s'est établi à 1,06% le mois dernier (hors assurance et coût des sûretés), soit 1 point de base additionnel par rapport à octobre. En un an, le taux moyen a perdu 13 points.
Même si les signes d'une remontée des valeurs se précisent, en raison notamment de la progression de l'inflation, les conditions restent exceptionnelles, et elles le sont depuis fin 2016. La hausse enregistrée au printemps 2020, à la fin du premier confinement, a vite été balayée par les replis mensuels successifs.
Le taux moyen s'affiche juste au-dessous de la barre de 1% (0,99%) sur la durée classique de 20 ans, à 0,86% sur 15 ans et à 1,13% sur 25 ans, la durée de remboursement maximale autorisée.
Les durées les plus longues pour les primo-accédants
Le niveau bas des taux d'intérêts permet aux ménages de s'endetter sur des durées plus longues pour s'adapter à l'augmentation des prix des logements. Selon le dernier indice des Notaires et de l'Insee, les prix des logements anciens ont grimpé en moyenne de 7,4% sur un an au troisième trimestre 2021. Le bond est plus net pour les maisons avec +9,4%, pour cause de demande accrue et d'une offre qui se tarit dans les zones prisées, comme les communes périphériques des grandes agglomérations et le littoral du Grand Ouest.
Pour les primo-accédants, souvent de jeunes ménages qui débutent dans la vie professionnelle, la durée moyenne d'emprunt est poussée à son maximum pour absorber les conséquences de cette inflation des prix des logements et la faiblesse de l'apport personnel.
61% prêts à l'accession à la propriété sont souscrits sur une durée comprise entre plus de 20 ans et 25 ans. L'allongement de la durée de remboursement permet de contenir le taux d'effort sous les 35%, la limite qui deviendra réglementaire à compter du 1er janvier prochain conformément aux directives du régulateur financier.
Coût relatif des crédits immobiliers en hausse
Autre record établi par le marché du crédit à l'habitat, celui du coût relatif des opérations. Il atteint son niveau le plus élevé jamais observé, à 4,8 années de revenus en novembre 2021. Il augmente de 4,4% depuis janvier dernier, alors que les revenus des ménages sur ces opérations progressent quatre fois moins vite (+1,1% sur onze mois). Cela illustre la forte poussée inflationniste des prix immobiliers depuis un an qui implique par ailleurs de casser sa tirelire pour acheter un bien à crédit.
Toujours plus d’apport personnel
Le niveau de l'apport personnel s'est accru de 13% sur les onze premiers mois de l'année 2021, une hausse qui fait suite à celle de 2020 (+11,3%). Une récente étude de Finance Conseil évaluait à près de 30 000€ le montant moyen de l'apport personnel à l'échelle de l'hexagone. Il cumule à plus 85 000€ en Île-de-France. Le temps des dossiers financés sans apport est à conjuguer au passé. Emprunter pour acheter un logement n'a jamais été aussi bon marché, mais tout le monde ne peut en bénéficier.
Les perdants sont les ménages avec des revenus modestes qui n'ont pas l'apport suffisant pour diminuer le montant de la dette et rester ainsi dans les clous de l'endettement, et les candidats à l'investissement immobilier, déjà détenteurs d'un premier crédit sur leur résidence principale. Ces derniers sont victimes du calcul du taux d'endettement qui inclut désormais les futurs loyers dans les revenus plutôt que les déduire de la mensualité de crédit.