La loi Lemoine introduite en 2022 est une énorme avancée pour les emprunteurs, car elle leur permet de changer d’assurance de prêt immobilier à tout moment pour trouver mieux et surtout moins cher. Encore trop peu profitent malheureusement de cette mesure en faveur du pouvoir d’achat, principalement par manque d’information. Une récente étude de l’Argus de l’Assurance en partenariat avec le courtier April met en lumière les immenses progrès que doit faire la loi Lemoine pour remplir son objectif : permettre un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l’assurance de prêt immobilier.
Loi Lemoine : trop peu de passages à l’acte
Adoptée par le Parlement en février 2022, et entrée en vigueur le 1er juin 2022, la loi Lemoine est l’ultime tentative du législateur de briser un tant soit peu le quasi-monopole des banques en assurance de prêt immobilier.
Les dispositifs précédents n’ont pas réussi à faire bouger les lignes. Plus de dix après la loi Lagarde qui a introduit le libre choix du contrat, les bancassureurs captent toujours ce produit contraint pour l’emprunteur immobilier. La loi Hamon et l'amendement Bourquin venus par la suite n’ont pas fait mieux, ces textes ont même confirmé que la délégation lors de la demande de crédit était un leurre en donnant la possibilité à l’emprunteur de changer de formule dans un deuxième temps durant les premiers douze mois ou à date d'anniversaire du contrat.
On reste pourtant dans l’épaisseur du trait. Selon une étude réalisée en avril dernier pour L’Argus et April, malgré l'entrée en lice de la loi Lemoine, seulement 7% des emprunteurs ont changé d’assurance de prêt immobilier ces deux dernières années auprès de courtiers ou d'assureurs alternatifs.
Rappelons que la souscription à l'assurance emprunteur n'est pas une obligation légale, mais reste un préalable pour obtenir le financement de son crédit immobilier. La banque prêteuse l'exige pour sécuriser la bonne fin du prêt en cas d'accident de la vie (décès, invalidité, incapacité de travail, voire perte d'emploi).
Important : l'acceptation par la banque d'une assurance de crédit immobilier déléguée en première intention ou en substitution est conditionnée à l'équivalence de niveau de garanties.
Manque d’information
Autre chiffre qui traduit la faible portée de la loi Lemoine, 12% des emprunteurs envisagent de changer de formule, en recul de 5 points par rapport à l’édition précédente de cette étude.
Le manque d’information sur les modalités de résiliation serait la première raison de cet échec. L’étude révèle que 54% des emprunteurs n’ont pas reçu l’information comme quoi ils avaient le droit de changer d’assurance. Ceux ayant été dûment informés ne représentent que 31% des emprunteurs, soit 7% de moins que l’an passé. Pour rappel, la loi Lemoine oblige les banques à informer chaque année leurs clients emprunteurs de leur droit au changement d’assurance de prêt à tout moment et des modalités qui en découlent.
Même si 82% des personnes interrogées savent qu’elles peuvent faire jouer la concurrence et souscrire une assurance de prêt en dehors de leur banque, 67% ne connaissent pas la loi Lemoine, un pourcentage en hausse de 6 points par rapport à 2023. La loi Lemoine régresse et les banques gardent la main en 2024 sur l’assurance emprunteur.
Changer d’assurance de prêt immobilier : mesure pouvoir d’achat
L’étude indique par ailleurs que plus la souscription à l’assurance crédit immobilier est récente, plus les emprunteurs déclarent avoir été informés par le prêteur de leur droit au changement de formule. La part des personnes informées progresse donc à mesure que la date de souscription est proche :
- moins d’un an : 59%
- de 1 à moins de 2 ans : 41%
- de 2 à moins de 5 ans : 40%
- de 5 à moins de 10 ans : 24%
Il est vrai que le gain généré par le changement d’assurance est d’autant plus important que l’opération intervient le plus rapidement après la date de signature de l’offre de prêt. Magnolia.fr réalise chaque mois un baromètre du pouvoir d’achat immobilier qui met en exergue l’intérêt de changer de contrat au plus tôt. Les économies se chiffrent en plusieurs milliers, voire dizaines de milliers d’euros sur la durée résiduelle de remboursement. La loi Lemoine permet en effet de résilier à peine l’encre sèche, sans engagement de souscription minimum, comme cela est imposé dans le cadre de la résiliation en assurance auto ou assurance habitation, et en mutuelle santé.
Il y a pourtant des motifs de se réjouir. 42% des emprunteurs ayant changé d’assurance de prêt immobilier l’ont fait sans aucune difficulté, soit 8 moins additionnels par rapport à 2023. 96% se disent plutôt ou tout à fait satisfaits d’avoir franchi le pas, ce qui traduit bien l’utilité de la loi Lemoine.
La recherche d’un tarif plus compétitif est de loin la motivation principale (83%). A contrario, 59% de ceux qui ont préféré conserver leur contrat justifient leur immobilité par le fait qu’ils doutent des économies potentielles. Là encore, le manque d’information est à incriminer. Il suffit de faire quelques simulations en ligne sur un comparateur pour constater que la substitution d’assurance est dans la grande majorité des cas bénéfique financièrement pour l’emprunteur. Renégocier son assurance emprunteur doit devenir un geste évident compte tenu des économies à la clef.
L'étude portait uniquement sur le volet changement d'assurance emprunteur de la loi Lemoine. Le texte contient deux autres mesures phares : la suppression du questionnaire de santé pour les prêts d'un montant inférieur ou égal à 200 000€ avec un terme avant les 60 ans de l'emprunteur (jusqu'à 400 000€ en cas de co-emprunteur avec quotité à 50%), et l'amélioration du droit à l'oubli pour les personnes atteintes d'un cancer ou d'une hépatite C. Loi pouvoir d'achat, la loi Lemoine est aussi un dispositif inclusif pour les assurés emprunteurs avec un passif de santé, voire un risque aggravé de santé.